Messieurs les Présidents de la République¹ et leurs épouses, Monsieur le Président de l’Assemblée nationale, chers dirigeants des Hongrois de l’étranger, Mesdames et Messieurs,
L’année 2024 ne pouvait pas commencer plus mal. Notre Présidente de la République a remis sa démission à l’Assemblée nationale. C’est comme un cauchemar. Nous en sommes tous frappés. Une présidente honorée et respectée, qui a œuvré, et même lutté pour son pays, pour les Hongrois et pour leurs familles, qui a dignement représenté la Hongrie dans le vaste monde, nous quitte. Pour nous tous, elle était parfaitement à sa place dans la fonction qui était la sienne. Elle a incarné le meilleur moi des Hongrois, nos bonnes qualités. Une mère de famille, aimable et bien préparée, qui ne voulait pas affirmer son aptitude contre les hommes et selon leurs critères. Cela m’a toujours impressionné. De sa manière naturelle, elle nous a montré, à nous les hommes, que l’univers sentimental et intellectuel des femmes est indispensable et irremplaçable dans tous les domaines de la vie, y compris dans la politique. Parce qu’un homme et une femme ne sont chacun que deux moitiés, mais ensemble ils forment une unité qui les rend capables de créer une vie complète, saine et heureuse dans la famille comme dans le pays. Son départ est un acte juste, mais il est aussi une grande perte pour la Hongrie. La raison de sa démission est qu’elle a fait bénéficier d’une grâce présidentielle une personne condamnée pour avoir couvert un acte criminel commis au détriment d’enfants. La majorité des Hongrois n’a pas accepté cette décision, et l’a même rejetée. Or l’une des obligations les plus belles, et en même temps les plus difficiles de la Présidente est la préservation de l’unité nationale, et si celle-ci est ébranlée pour quelque raison que ce soit, son obligation est de la restaurer. Nous savons, par les raisons de la démission, que c’est sa propre décision qui a ébranlé l’unité nationale, et c’est pourquoi elle-même n’était plus en mesure de la restaurer. Pour cette raison, nous devons admettre que dans cette histoire il est arrivé ce qui devait arriver. La restauration de l’équilibre ébranlé, l’apaisement de la violente tempête de l’indignation, la réunification de la nation en matière de protection de la famille et de l’enfance n’est possible qu’au travers de la démission de la Présidente et de l’installation d’un nouveau président. La ministre de la Justice, conformément à la pratique continue des vingt-cinq dernières années, a contresigné la décision présidentielle. Son départ est une conséquence inéluctable et – je crois – injuste des lois de la vie politique.
De bonnes personnes peuvent prendre de mauvaises décisions. Cela arrive aux meilleurs. S’il existait une machine à remonter le temps, et si nous pouvions retourner dans le passé, je suis sûr que nous corrigerions la faute. Mais une telle machine n’existe pas. C’est donc au gouvernement qu’incombe la tâche de remettre les montres à l’heure, de restaurer l’ordre moral, et de remédier à la situation, y compris sous l’angle juridique. L’enfant est sacro-saint, porter la main sur lui appelle la punition la plus lourde. Dans ces cas, il n’y a pas de place pour la grâce. C’est pourquoi la démission de la Présidente était un acte juste, qui nous renforce. Je remercie au nom de nous tous, le cœur lourd, le travail de la Présidente et de la ministre de la Justice. Pour ce qui concerne le débat qui s’est ouvert à l’occasion de ces démissions, je voudrais seulement dire – et je dois dire – qu’il y a davantage d’honneur dans le petit doigt de chacune des dames démissionnaires que dans tous les dirigeants de la gauche réunis.
Mes chers amis,
Si déjà le problème est venu à nous, ayons au moins assez de présence d’esprit pour en tirer des enseignements ensemble. Ne nous en privons pas maintenant. Le drame qui se déroule sous nos yeux nous rappelle les risques qui nous guettent jour après jour. Aujourd’hui, en un moment où il est de moins en moins question de débat entre des points de vue et des projets, où l’indépendance et la souveraineté des Etats-nations est la cible des puissants centres de force et de finance du monde, les risques sont tout particulièrement élevés. Il est bon de réaliser qu’en politique les lois de la boxe sont aujourd’hui plus déterminantes que celles du ballet. L’on a beau être Mike Tyson ou Muhammad Ali, il faut savoir qu’en politique l’on est toujours à un coup du sol, et que seule une évaluation attentive de la situation et une prudence de bon aloi peuvent nous aider. Il ne faut pas négliger bien sûr la possibilité de mettre au sol son adversaire d’un bon direct, mais là c’est un autre enseignement et un autre discours, consistant à reconnaître qu’il vaut mieux donner des coups qu’en recevoir. Le fond de l’affaire est que la loi d’airain de la politique est l’humilité. Le service de la nation exige une humilité personnelle, et il faut savoir que quelle que soit la hauteur que l’on a atteinte, l’on ne peut jamais être assez intelligent seul. Il n’y a pas de place protégée, et l’on peut aussi commettre des erreurs dans les plus hautes fonctions. L’erreur politique reste évidemment contrariante, même si elle a des raisons. Et elle l’est bien plus quand elle n’en a pas ! Ce qui a, du côté de la droite, transformé en colère l’indignation face à la décision de grâce est qu’il ne s’agissait pas d’une décision prise dans une situation complexe, mais d’une faute non provoquée. Pour la droite, c’est aussi simple que le jour : pas de grâce pour les crimes pédophiles ! Mais ce qui exacerbé la colère de la droite doit maintenant modérer nos impulsions. Car la démission est une réparation et un exemple pour le pays. Elle a donné l’occasion à la Hongrie de sortir renforcée de cet épisode difficile, et il en sera ainsi.
Au-delà de l’expérience que nous avons vécue, des tâches nous attendent. Il faut renforcer le système hongrois de protection de l’enfance, il faut le revisiter et compléter nos règles juridiques de protection de l’enfance, depuis la Constitution jusqu’aux décrets ministériels. Le calvaire des victimes nous y oblige. Il nous oblige à renforcer la gestion et le contrôle de nos institutions de protection de l’enfance, ainsi que les prescriptions et les contraintes de ceux qui y travaillent. Nous devrons présenter tout cela à l’Assemblée nationale sous la forme d’un nouveau projet de loi sur la protection de l’enfance. La gauche hypocrite et bicolore aura l’occasion d’y faire le bravache. Il y aura de quoi s’agripper. Il est également urgent d’élire le nouveau président de la République. Je demande aux groupes parlementaires de la majorité gouvernementale d’entamer dès le jour de la cessation des fonctions de la Présidente la procédure conduisant à l’élection du nouveau président. Je demande que la période de transition soit réduite au minimum, comme cela se doit pour un grand et solide parti de gouvernement.
Mes chers amis,
J’en ai terminé là avec le plus important et le plus urgent. Mais la vie continue, le travail aussi, et les tâches de l’année 2024 ne seront ni simples, ni faciles. Nous nous souvenons peut-être que 2019 était la dernière année de paix. En février 2020, la pandémie du Covid nous est tombée dessus, et en 2022 la guerre russo-ukrainienne a éclaté. Voici la cinquième année que nous devons vivre et travailler dans des conditions exceptionnelles et éprouvantes. Nous en sommes tous atteints, individuellement, dans nos familles comme dans notre grande famille commune, la nation hongroise. Voilà cinq ans que tout le pays et chaque famille travaille dur pour préserver ce que nous avions déjà atteint dans le passé. Il y a des points où nous avons réussi, et d’autres où nous n’avons pas réussi.
Nous avons réussi à préserver le plus important : les emplois. Nous voyons même que l’on n’a jamais autant travaillé en Hongrie qu’en ce moment-même. Nous avons dépassé notre plus grande promesse de 2010, nous sommes au-delà de la création d’un million de nouveaux emplois. Bien sûr, ici aussi, il y en a qui réclament davantage : encore, encore, encore, ce n’est pas assez ! Le taux d’emploi est aujourd’hui de 75%, mais nous voulons atteindre les 85% et nous les atteindrons. D’après nos estimations, il reste encore en Hongrie au moins 300 000 personnes qui peuvent être intégrées dans le monde du travail, et il y a chaque année davantage de Hongrois qui reviennent au pays que de travailleurs prenant des emplois invités. Nous avons également réussi à augmenter les retraites. L’on pouvait l’attendre de nous, puisque lorsque nous sommes arrivés aux affaires c’est ce que nous avions convenu avec les retraités. Ce que l’on ne pouvait en revanche pas attendre, et qui constituait plutôt un exploit – même si l’on commence à s’y habituer – a été la restitution du treizième mois de retraite que la gauche avait supprimé. Cette restitution exige chaque année des efforts et des performances d’équilibriste de la part du ministre des Finances Mihály Varga. Merci à lui ! Il est sous forte pression, parce que le treizième mois de retraite est pour les économistes libéraux, dans la situation actuelle de l’économie mondiale, un luxe budgétaire que la Hongrie ne peut pas se permettre. Je comprends bien qu’il est pénible pour la gauche de se trouver confrontée chaque année au fait que nous rendons ce qu’elle a retiré, mais ce point de vue ne peut tout de même pas primer sur l’intérêt des retraités et le respect qui leur est dû. En revanche, nous n’avons pas réussi à préserver le rythme de notre croissance d’avant le Covid, ni le bas niveau de notre déficit budgétaire. Mais nous avons réussi à préserver le haut niveau de notre commerce extérieur et de nos exportations. Nous avons ainsi réussi à éviter ce que les économistes appellent le double déficit, lorsque le déficit budgétaire et la balance commerciale se détériorent en même temps, dont la conséquence est en général la faillite financière et les restrictions économiques. Si cela ne s’est pas produit, le mérite imprescriptible en revient à Monsieur le ministre Péter Szijjártó, responsable du commerce extérieur. Merci beaucoup ! Malgré une année difficile, nous avons réussi à rapprocher de nous les Hongrois d’au-delà des frontières, car nous sommes tout de même un gouvernement national. Nous avons construit trois ponts au-dessus de l’Ipoly2, le train circule dix fois par jour entre Szeged et Szabadka3 et l’avion trois fois par semaine entre Budapest et Kolozsvár4. Si nous y ajoutons que nous avons réussi – en nous portant au secours de la Banque nationale – à faire descendre l’inflation-record de 25% à moins de 4%, à maintenir le déficit budgétaire sur une pente descendante, à augmenter le salaire minimum de 15% et le salaire minimum des travailleurs qualifiés de 10%, nous n’avons vraiment pas de raisons de ne pas être satisfaits. Nous avons réussi à nous sortir intacts de la difficile année 2023.
C’est très bien de s’en sortir, de contourner les écueils, éviter les dangers peut relever de l’exploit, mais l’on aspire tout de même à davantage, nous attendons tout de même davantage de la vie. En football, ce n’est pas non plus l’équipe qui a la meilleure défense qui gagne, mais celle qui marque le plus de buts. Alors, qu’est-ce qui nous attend, que pouvons-nous atteindre en 2024 ? Essayons de fermer les yeux un moment et de nous imaginer au seuil de l’année 2019, la dernière année de paix. L’inflation est à 3%, la croissance économique à 5%. Le déficit budgétaire est à moins de 2%, la dette publique est bien inférieure à 70% et en constante réduction. 21 000 nouveaux logements se construisent, et près de 90 000 enfants naissent. Voilà les niveaux où nous évoluions, quand le Covid a frappé à notre porte. C’est ce niveau que nous devons rattraper en 2024. En tout cas, les bookmakers parient sur le succès hongrois : il suffit de jeter un œil sur les perspectives de l’économie hongroise telles que publiées par l’Union européenne. Mais malgré cela, ce ne sera pas une promenade de santé pour le ministre de l’Economie Márton Nagy. Je dis donc : allez Monsieur le Ministre !
Après que nous aurons retrouvé le chemin abandonné de force en 2019, nous devrons aussi prendre en compte les grands changements survenus entretemps dans le monde. Nous ne pouvons pas en faire l’impasse. Dans le domaine de l’économie, nous constatons que l’ère de l’énergie verte ne frappe plus à notre porte, elle l’a défoncée. L’avenir appartient à l’énergie verte, et bien entendu à ceux qui auront su s’y adapter rapidement et efficacement. La stabilité de la politique hongroise est mondialement connue et reconnue, nous disposons d’une majorité parlementaire des deux-tiers, le gouvernement est uni, parce que le FIDESZ-KDNP est plutôt une alliance de camarades qu’une coalition. Du point de vue de la population, le sens et l’utilité de cette stabilité, de cette unité, de cette force gouvernementale considérable réside précisément dans notre capacité ultra-rapide d’adaptation. Si notre esprit est bien en place et s’il est assez réactif, et si nous faisons un bon usage de nos forces, nous pourrons être les plus rapides de toute l’Europe dans l’adaptation aux changements. C’est un avantage concurrentiel déterminant, et c’est pour cela qu’il pince les yeux de plus d’un.
La transition verte arrive en Hongrie au bon moment. Nous pouvons faire d’une pierre deux coups. Notre pays sera plus vivable, et nous pourrons nous débarrasser de la dépendance énergétique que nous traînons depuis l’époque de la Monarchie. La transition verte suppose deux choses : la production et le stockage de l’énergie verte. Notre plan consiste à construire Paks2, à prolonger la durée de vie de Paks15 , et à construire à marche forcée nos installations de panneaux solaires, les grandes comme les petites. Le monde s’est déjà rendu compte que sans énergie nucléaire il n’est pas possible d’éliminer les énergies fossiles, et Bruxelles s’est résigné à reconnaître tôt ou tard les centrales nucléaires comme productrices d’énergie verte. Voilà ce qu’est à Bruxelles un débat « scientifique », quand la France est derrière. Je me souviens, dans mon enfance, des articles de presse commençant par les mots : « Selon les savants soviétiques… ». Et que l’on vienne nous dire que le monde n’évolue pas ! Notre programme de développement des panneaux solaires avance au galop, au point de ressembler parfois à un cheval câbré qu’il nous appartient même de calmer et de brider. Nous avons dépassé tous nos plans et battu tous nos records. Nous disposons déjà d’une capacité de 5 600 mégawatts en panneaux solaires, et il y a 255 000 ménages en Hongrie qui exploitent des mini-panneaux familiaux. C’est ainsi que les panneaux solaires couvrent déjà 15% de notre consommation énergétique. Monsieur le ministre Csaba Lantos accomplit de véritables miracles. Nous construirons rapidement nos centrales énergétiques de réserve. Nous avons déjà connecté notre réseau électrique à ceux de nos voisins, et il ne manque plus que la connexion du réseau gaz avec la Slovénie. Nous sommes très proches – à distance de quelques années – de l’indépendance énergétique. Ceux qui prétendent qu’il n’y aura pas assez d’énergie pour le développement de notre économie et notre stratégie industrielle ne savent pas ce qu’ils disent, ou au mieux ils ne voient pas la forêt derrière l’arbre.
Plus compliqué est le stockage de l’énergie verte produite, d’autant plus que la technologie progresse à pas de géant, mais sur ce sujet nous sommes à l’avant-garde de l’Europe et même du monde. Encore seulement quelques années, et les installations de stockage d’énergie seront présentes dans tous les coins de notre vie, dans notre vie de tous les jours : dans nos voitures, dans nos maisons, dans nos lieux de travail, dans nos usines, dans nos zones industrielles. Le gouvernement hongrois y consacre des sommes considérables, plusieurs centaines de milliards de forints6 .
L’introduction de toute nouvelle technologie, Mesdames et Messieurs, s’accompagne de débats enflammés. Il s’y glisse parfois des arguments de bas étage, comme celui consistant à affirmer que nous n’avons pas assez d’eau, alors que tout le monde sait parfaitement que la petite Hongrie est un vaste bassin. L’eau de nos cours d’eau se déverse dans le pays, il ne dépend que de nous de décider combien d’eau nous gardons pour nous, et il en reste même largement pour nos voisins. En même temps, il faut respecter le point de vue légitime des gens en matière de protection de l’environnement et de sécurité. Il faut même donner la priorité à ce point de vue, et nous ne devons faire fonctionner que les installations conformes aux critères européens. Mais il est bon de savoir aussi que nous nous procurons une bonne partie de nos investissements dans l’énergie verte – qui atteignent souvent des milliards d’euros – dans un contexte de lutte acharnée, de lutte au couteau que ce soit avec nos voisins ou avec des poids super-lourds tels que la France, l’Allemagne ou l’Espagne. Et ici, nous devons garder toute notre présence d’esprit, nous devons bien décrypter nos débats domestiques, car il est de notoriété publique – je dirais même de notoriété et d’aveu public – que « l’opposition-dollar7 » est financée de l’extérieur, et je ne crois pas que les financeurs extérieurs feraient cela pour ses beaux yeux. Ne soyons pas naïfs, et pour que la gauche le comprenne aussi : « vigilance, camarades ! » La lutte diplomatique pour les investissements ressemble plutôt aux épreuves de natation de fond, où pendant que l’on nage l’on doit aussi se battre, ou au moins se bousculer. Nous n’y sommes pas mauvais, Kristóf Rasovszky8 vient de gagner le championnat du monde du 10 kilomètres. Bravo ! Nous voudrions l’imiter. Pour la première fois depuis des temps immémoriaux, nous ne sommes pas suiveurs dans la transformation révolutionnaire d’une technologie, mais son avant-garde globale. Et cela nous permet de sauver nos usines automobiles. Beaucoup d’usines automobiles sont fermées ou délocalisées dans le monde. Il faut l’éviter en Hongrie. Imaginez Győr sans Audi ou Kecskemét sans Mercedes ! Et de plus, c’est un métier que nous connaissons, nous l’avons appris, nous avons d’excellents ouvriers, d’excellents ingénieurs et d’excellents chercheurs-développeurs. Nous ne pouvons pas nous permettre la folie des Verts allemands, pour lesquels la bonne voiture est celle que l’on ne produit pas. Un record de production automobile de dix ans a été battu à Győr, la production de voitures électriques de catégorie supérieure a démarré à Kecskemét, et nous produirons à Debrecen des véhicules électriques dont la catégorie n’existe pas encore sur le marché mondial. Le plus grand constructeur de voitures électriques du monde installe à Szeged sa première usine européenne, et l’on peut aussi se rassurer à Szentgotthárd9 : la production des nouveaux moteurs électriques démarrera sur la même chaîne que celle sur laquelle l’on a commencé il y a trente ans la production des moteurs à essence. La valeur de la production automobile hongroise, Mesdames et Messieurs, dépasse les 13 000 milliards de forints10 . Elle donne son pain quotidien à plusieurs centaines de milliers de familles. Nous avons accumulé un savoir-faire considérable dans tous les segments de ce secteur. Nos performances sont de niveau mondial dans un certain nombre de domaines : l’industrie de santé, la production de graines, l’industrie alimentaire, l’info-communication et la production automobile. C’est pourquoi la transition vers une industrie automobile verte en Hongrie est un gigantesque succès technologique et politique. Nous ne sommes pas assez riches pour nous permettre de renoncer à une seule de nos branches industrielles.
Pour ce qui concerne notre avenir à moyen terme, le camp national n’a jamais été à court de projets. La situation, les objectifs et les moyens d’action sont clairs : les Hongrois vivent mieux que sous l’ère Gyurcsány11 , mais pas aussi bien que nous le voudrions. Nous voulons que la Hongrie soit un des meilleurs pays d’Europe : fort, sûr, prospère, regardé avec respect dans le monde. Nous avons un très bon plan pour cela, en cinq points :
1. Être les premiers à comprendre et à saisir le sens du changement de l’ordre mondial.
2. Nous adapter le plus rapidement à la nouvelle situation. Pour cela : être rusés, vifs et coriaces.
3. Rester à l’écart de la guerre et de la politique des sanctions, et résister à la constitution des blocs, qui n’est autre que la nouvelle forme de la guerre froide.
4. Nous ouvrir au commerce, construire des routes, des ponts, des voies ferrées, développer des aéroports, bâtir un système d’enseignement capable de produire de nouveaux prix Nobel.
5. Soutenir nos entreprises implantées avec succès à l’étranger et désireuses de se développer, étayer nos branches industrielles traditionnellement fortes et investir dans les branches industrielles totalement nouvelles et situées au premier rang dans le monde.
Tout cela nous permettra de replacer la Hongrie et Budapest sur la carte du monde comme un centre de gravité politique, économique, culturel et commercial incontournable du Bassin des Carpates. Nous redeviendrons incontournables et inévitables dans la région, parce que c’est nous qui faisons les meilleures offres, et que ceux qui collaborent avec nous y trouvent leur compte. Nos voisins peuvent être sûrs que s’ils rencontrent des difficultés, ils pourront toujours compter sur la Hongrie. Aujourd’hui, 1 500 écoles accueillent des enfants de familles de réfugiés d’Ukraine. En Croatie, nous avons reconstruit les écoles endommagées dans le tremblement de terre à Petrinja et à Topolovac. Nous étions présents aux inondations de Slovénie et à l’incendie d’hôpital en Roumanie. Les Hongrois ont aidé la campagne de vaccination en Slovaquie, et même au temps de la grande pénurie nous avons envoyé plusieurs centaines de milliers de doses de vaccin à nos amis Tchèques. Sans qu’il faille s’en enorgueillir, cela fait du bien au sentiment de respect de soi de notre pays.
Tous nos plans sont prêts, et nous sommes capables de les mener à bien. L’année 2024 sera de nouveau celle des succès de la Hongrie. La question est seulement de savoir dans quel environnement il faudra lutter pour y parvenir. Savoir d’où viendront nos soutiens, savoir qui restera à distance, et savoir d’où viendront les attaques. La nuit des élections polonaises, c’est le film « Les Héros de Kelly12 » qui m’est venu à l’esprit : « Nous avons déjà bien assez de problèmes comme cela. A droite le général Patton, à gauche l’armée anglaise, à l’arrière notre propre artillerie qui nous tire dessus. La seule bonne chose est que si notre propre aviation ne nous ensevelit pas sous les bombes, c’est qu’en temps de pluie elle est incapable de décoller. » Voilà ce que nous devrons éviter. Ce ne sera pas facile, mais pas impossible non plus. La bonne nouvelle est que notre différend avec la Suède approche de sa clôture. Nous avons accompli des pas significatifs avec le premier ministre suédois dans le but de restaurer la confiance. Nous nous dirigeons vers une ratification de l’adhésion de la Suède à l’OTAN pour le début de la session de printemps du Parlement.
Tout cela est bel et bon, mais notre milieu vital naturel est l’Union européenne. Et il est de fait que l’année 2023 a été celle des échecs de l’Union européenne, ce qui nous tire vers le bas, nous inhibe et nous place un poids de plomb aux pieds. Pouvons-nous connaître le succès, si l’Occident est au même moment en échec ? C’est la question à un million de dollars. Les Africains – appelons-les à notre aide – disent : « Apprends bien à connaître l’arbre avant de t’y adosser ». Voilà vingt ans que nous avons adhéré à l’Union européenne. Aujourd’hui, nous avons appris à bien la connaître, et l’on peut douter qu’il soit opportun de s’y adosser. Drôle de sentiment ! L’on enseigne en effet dans les écoles que depuis mille ans tout ce qui est bon vient sans exception de l’Occident. Bien sûr, si nous y réfléchissons, du mauvais en est venu aussi. C’est d’Occident que sont venus les jacobins, les nazis, et au fond les communistes aussi – quoique pour ces derniers ce n’était finalement pas directement, mais en arrivant par un détour oriental qu’ils ont mis à sac la pauvre Hongrie. Mais il est vrai aussi qu’aux côtés des voix dissonantes de bonnes choses sont souvent arrivées d’Occident. Quoiqu’il ait fallu les adapter, le christianisme, les humanistes du roi Mátyás13 , les acquis de l’ère des réformes14 et du Dualisme15 sont tous arrivés d’Occident. Cette situation a changé aujourd’hui. L’on n’en croit pas ses yeux. Nous voyons aujourd’hui que seuls des problèmes nous arrivent depuis Bruxelles. La stratégie ukrainienne de Bruxelles a publiquement échoué. Pas seulement sur le champ de bataille, où la situation est catastrophique, mais aussi dans la politique internationale. C’est en vain que nous avons dit que cette guerre est une guerre fratricide entre deux pays slaves, et pas la nôtre, Bruxelles s’est pratiquement engagé dans le conflit. Sous sommes restés seuls avec notre position aux côtés de la paix, comme auparavant avec notre position hostile à la migration, et nous aurons raison exactement de la même manière dans le cas de cette guerre aussi. Il est tragique que jusque-là plusieurs centaines de milliers de personnes aient dû et doivent mourir. Cela étant dit, la position de la Hongrie est inchangée. Nous ne nous laissons pas entraîner dans la guerre. Nous ne livrerons pas d’armes. Y compris s’il y a des grandes puissances à qui cela ne plaît pas. Nous pourrions dire que la gestion de la crise par Bruxelles est « classique » : « classe » pour l’Amérique, et « cou-couche » pour les autres16 . La pression a atteint un niveau tel que les ambassadeurs se rendent au Parlement17 pour contrôler le bon comportement de la gauche-dollar. Nous voudrions les aider en leur indiquant que ce n’est pas une bonne tactique. En Hongrie, nous avons eu le loisir d’apprendre à gérer la pression. Nous sommes comme le bon café-express : une forte pression est nécessaire pour que nous exprimions le meilleur de nous-mêmes. S’il ne s’agissait pas d’une guerre, nous pourrions même les remercier. Mes chers amis, l’on se rendra compte tôt ou tard partout que l’intérêt bien compris de tous est de nous laisser tranquilles. L’on appelle cela de manière élégante en diplomatie une « proposition de tolérance ». Nous attendons patiemment qu’elle soit acceptée.
Nous restons à l’écart de la guerre, mais nous n’en sommes pas sortis de l’eau. C’est un secret de Polichinelle à Bruxelles que les 50 milliards d’euros destinés sur quatre ans à l’Ukraine ne suffiront pas, parce que rien que cette année un trou de 37 milliards grève le budget ukrainien. Les Etats-Unis renâclent de plus en plus, leur enthousiasme à financer l’Ukraine s’émousse de jour en jour. Une part croissante des charges s’appesantit sur une Europe dont l’économie s’est par ailleurs alitée. L’heure est grave, nous en crèverons, et la totalité du continent risque d’y passer. C’est pour cette raison que nous nous hérissons à l’idée de lever de toujours nouveaux emprunts communs avec les autres pays de l’Union européenne. Partager sa tirelire avec d’autres ne mène à rien de bon. Si l’un est déséquilibré, les autres se déséquilibrent avec lui. Nous ne pouvons pas nous le permettre. Il faudrait graver dans la pierre que la voie de l’emprunt commun n’est plus praticable pour la Hongrie. Ici aussi, je demande l’aide des groupes parlementaires de la majorité. Et comme s’il n’y avait pas déjà assez de problèmes, les nouvelles réglementations agricoles et l’ouverture des marchés à l’Ukraine ont mis l’agriculture européenne dans une situation impossible. Au lieu d’aliments sains, produits sur place, l’on nous colle de la viande artificielle et des bricolages génétiquement modifiés. A Bruxelles, l’on ne dit pas seulement n’importe quoi, mais on nous le fait aussi manger. Les agriculteurs manifestants avec leurs tracteurs me l’ont dit (je traduis dans un style élégant) : que ceux qui ont deux mères mangent ces trucs bruxellois à la mode. Ce que les agriculteurs qui manifestent dans toute l’Europe demandent simplement, c’est que les règlements contraignants ne soient pas écrits par des fanatiques du climat et des savants de canapé dérangés gambadant dans les couloirs de Bruxelles. C’est un mystère que ce ne soient que les Hongrois qui se rendent compte que l’Union européenne n’est responsable qu’à hauteur d’à peine 7% des émissions de gaz à effet de serre du monde, alors que les Etats-Unis et la Chine y interviennent ensemble pour 40% ! Pourquoi d’autres ne voient pas que c’est un baiser de la mort, avec cette différence que ce n’est pas celui qui le reçoit qui meurt, mais celui qui le donne ?
Sur la migration aussi, je n’ai que de mauvaises nouvelles. Selon les mots du directeur de l’Agence européenne de protection des frontières – dont, conformément à son nom, la mission devrait être de protéger les frontières – « Rien ne peut empêcher les gens de franchir les frontières ». Tu parles, disons-nous dans notre vocabulaire spécial d’indigènes. Même l’aveugle voit que la migration est un risque pour la sécurité. Un risque de sécurité que nous ne pouvons pas éliminer. Elle est de surcroît un terreau de l’antisémitisme et arrache de leur sol européen les racines des sociétés européennes. Ce sont ceux-là même qui, à Bruxelles et à Berlin, ont attiré les migrants sucre à la main qui s’étonnent maintenant d’être assaillis par les guêpes.
L’on trouve dans les Ecritures, Mesdames et Messieurs, un passage inquiétant où il est demandé : « Lorsque viendra le Fils de l’Homme, trouvera-t-il encore de la foi sur Terre ? » Nous pourrons bientôt nous poser la même question, lorsque nous nous rendrons dans vingt ans en Occident : y trouverons-nous encore de l’Europe, ou quelque chose de totalement différent ? Les pays occidentaux vivent bien, ils sont riches, ils ont encore de l’argent, davantage même que nous. Cela occulte les problèmes pour un temps. Mais il est temps de regarder la réalité en face, à savoir que la compétitivité européenne a plié le genou à cause de la guerre, des sanctions et de la logique des blocs, et que la conséquence fatale en sera la chute des classes moyennes. Et ce jour-là, la cloche aura sonné pour la démocratie. Et comme si les problèmes économiques ne suffisaient pas, voilà les maladresses politiques. Au lieu de s’appuyer sur les mérites et des procédures objectives, l’élargissement est devenu, dans l’intérêt des Ukrainiens, un instrument de communication au service d’objectifs de politique immédiate. Et entretemps Bruxelles a abandonné les Balkans à leur sort parce que l’Ukraine a besoin de l’argent. Et pour couronner le tout, il s’est avéré – et cela a été avoué par la suite – que les procédures sur les valeurs européennes et sur l’Etat de droit n’étaient que de simples nerfs de bœufs avec lesquels Bruxelles frappe sans hésitation les empêcheurs de danser en rond.
En un mot comme en cent : Bruxelles a abandonné les Européens à leur sort. Jamais il n’y a eu une distance aussi grande entre la politique bruxelloise et les intérêts et la volonté des populations européennes. Il doit donc y avoir un changement à Bruxelles. Le poète hongrois Attila József dirait : « Ce n’est pas moi qui crie, c’est la terre qui gronde ». Mais ce changement ne se fera pas tout seul. Il faut le provoquer. L’Europe doit réoccuper Bruxelles. Il faut qu’il y ait quelques européens parmi les Bruxellois.
Mes chers amis, Mesdames et Messieurs, notre destin peut tourner en 2024. C’est une année de super-élections, où à Bruxelles, en Amérique, en Inde et dans une douzaine d’autres pays les gens décideront avec quel timonier ils souhaitent naviguer dans la périlleuse débâcle des transformations que traverse l’économie mondiale. Ce qui est important dans tout cela pour la Hongrie, c’est que de vastes chances s’ouvrent devant nous. La scène de la politique mondiale nous présentera à la fin de l’année un aspect très différent de ce que nous voyons maintenant, à son début. Et si le Bon Dieu nous vient en aide, les marges de manœuvre de la Hongrie ne se rétréciront pas, mais s’élargiront dans une mesure inconnue depuis longtemps. Nous ne pouvons pas nous ingérer dans les élections d’autres pays, mais… Mais nous aimerions beaucoup que le président Donald Trump retrouve la présidence et fasse la paix ici, du côté oriental de l’Europe. Il serait temps d’une présidence Make America Great Again en Amérique. Nous aussi, nous nous préparons à une présidence. Je veux parler de la présidence hongroise de l’Union. Make Europe Great Again ! Refaisons une grande Europe ! MAGA là, MEGA ici. Et l’artiste Mága18 est parmi nous. Une grandeur retrouvée en Amérique et en Europe, de la connectivité, une collaboration régionale renforcée entre la Hongrie, la Slovaquie, l’Autriche, la Serbie, et un tournant souverainiste à Bruxelles. Voilà ce que nous souhaitons trouver sous l’arbre pour le Noël de cette année. Ce ne sont pas les bureaucrates bruxellois qui sortiront l’Europe du pétrin. Il est inutile de gaspiller de l’énergie à essayer de les convaincre, l’on ne ferre pas un cheval mort. Le véritable changement ne peut être apporté que par une nouvelle droite européenne dont nous, les Hongrois, faisons partie. Abzug Bruxelles, vive l’Europe ! Mais attention de ne pas jeter l’enfant avec l’eau du bain : la nouvelle droite ne doit pas être une alternative à l’Europe, mais une alternative européenne. C’est ainsi qu’il vaut la peine, c’est ainsi qu’il faut considérer les élections européennes à venir, c’est ainsi et pour cela qu’il vaut la peine de lutter pour la victoire.
La Hongrie par-dessus tout, le Bon Dieu au-dessus de nous tous ! Allez la Hongrie, allez les Hongrois !
[1] Pál Schmitt et János Áder, anciens présidents de la République
[2] Rivière séparant la Hongrie de la Slovaquie
[3] Aujourd’hui Subotica, en Serbie
[4] Aujourd’hui Cluj-Napoca, en Roumanie
[5] La centrale nucléaire hongroise, située à Paks, au bord du Danube
[6] 100 milliards de forints = 250 millions d’euros
[7] Nom donné par les milieux pro-gouvernementaux à l’opposition de gauche, qui aux dernières élections législatives a bénéficié de financements en dollars provenant des Etats-Unis
[8] Champion de natation hongrois
[9] Ville de l’ouest de la Hongrie, où se trouve une usine de moteurs du groupe Stellantis
[10] 33 milliards d’euros
[11] Ancien premier ministre socialiste entre 2004 et 2009
[12] Film américano-yougoslave de 1970 tournant la guerre en dérision
[13] Roi de Hongrie de 1458 à 1490, grande figure de la Renaissance
[14] La première moitié du 19° siècle est considérée comme la grande période des réformes en Hongrie
[15] Mis en place en 1867 par le compromis conclu avec l’Autriche
[16] Jeu de mots avec le mot hongrois « klasszikus » qui se prononce « classicouche », kuss (prononcé « couche ») signifiant en langage familier « silence », dont l’équivalent français serait le « cou-couche panier » par lequel on intime le silence à un chien
[17] Allusion à la présence dans les loges de l’Assemblée nationale d’un certain nombre d’ambassadeurs de pays étrangers, notamment de celui des Etats-Unis, le jour de la convocation par l’opposition d’une session extraordinaire avec à l’ordre du jour la ratification de l’adhésion de la Suède à l’OTAN. Les parlementaires de la majorité gouvernementale n’y ayant pas pris part, l’Assemblée n’a rien pu voter.
[18] Zoltán Mága, célèbre violoniste hongrois, présent dans la salle