Mesdames et Messieurs, bonjour.
Monsieur le Premier ministre,
C’est avec respect que je vous salue ici, aujourd’hui, en public, pour la première fois depuis huit ans. Notre dernière rencontre remonte à huit ans à Budapest, et pour ma part, je me suis rendu dans votre pays pour la dernière fois en 2021. Depuis, le monde a profondément changé. La sécurité globale est aujourd’hui confrontée à de graves menaces : l’un des exemples les plus tragiques et les plus marquants en a été l’attentat terroriste subi par votre pays, Israël, il y a un an et demi. Il s’agissait d’une attaque cruelle et d’une gravité extrême, une attaque qui a piétiné la souveraineté d’Israël, et qui a profondément ébranlé le monde entier, y compris la Hongrie. La Hongrie a, dès le premier instant, exprimé clairement sa position : nous nous tenons aux côtés d’Israël, en faveur de sa souveraineté, de son droit à l’autodéfense, et de la sécurité du peuple israélien. Et depuis lors, nous maintenons cette position dans tous les forums de la politique internationale. Aussi, je souhaite beaucoup de succès à Monsieur le Premier ministre ainsi qu’au gouvernement d’Israël dans leurs efforts pour assurer la sécurité de leur peuple et faire valoir leur droit légitime à se défendre.
Monsieur le Premier ministre,
Des changements ont également eu lieu en Hongrie, mais surtout au sein de l’Union européenne. Ces dernières années, la Hongrie a été, en Europe, une île de liberté, tout en demeurant un gardien résolu et un porte-étendard de la civilisation judéo-chrétienne. À l’attention de la presse : la communauté juive de Hongrie est, en nombre, la troisième plus importante d’Europe. Et je peux affirmer avec certitude qu’aujourd’hui, c’est ici qu’elle est la plus en sécurité, sur l’ensemble du continent. Ce dont nous avons parlé aujourd’hui, et dont nous parlerons encore, c’est de ce phénomène qui nous a tous surpris au cours de la dernière décennie : l’antisémitisme a atteint des proportions inédites en Europe de l’Ouest. Comme vous le savez, les drapeaux du Hamas n’ont jamais été hissés et ne le seront plus jamais. Dans ce pays, dans notre Patrie, il y a une tolérance zéro face à l’antisémitisme, et nous faisons en sorte qu’elle soit appliquée par tous les moyens à notre disposition. Nous protégeons tous nos citoyens, et nous accordons une attention particulière aux groupes qui sont exposés à des menaces exceptionnelles. Et aujourd’hui, partout dans le monde, la communauté juive fait partie de ces groupes les plus gravement menacés. C’est pourquoi je tiens à vous réaffirmer, comme je l’ai déjà exprimé lors de nos entretiens, que la Hongrie ne fait preuve d’aucune tolérance à l’égard de l’antisémitisme. Notre position est claire : tolérance zéro. Je le répète, et je le dis sans joie, car il est regrettable qu’il soit encore nécessaire de le déclarer aujourd’hui, mais la réalité est la suivante : de toutes les communautés juives d’Europe aujourd’hui, celles qui vivent en Hongrie sont celles qui se sentent le plus en sécurité. Nous avons également abordé avec Monsieur le Premier ministre la question de l’importation de l’antisémitisme en Europe de l’Ouest. L’immigration illégale entraîne inévitablement une montée de l’antisémitisme. L’élite bruxelloise ne veut pas, ou ne peut pas, y mettre un terme. Elle ne cherche pas à arrêter l’immigration illégale, mais à la gérer. La Hongrie, quant à elle, ne cède pas sur ce point. La Hongrie n’accepte aucune forme de migration, et elle ne permettra l’application d’aucun accord migratoire européen sur son territoire, car cela mettrait en danger la sécurité de ses citoyens, de tous ses citoyens. De plus, c’est pour nous une question de souveraineté.
Il existe également une convergence d’intérêts, Mesdames et Messieurs, entre nos deux pays. Nous avons intérêt, non seulement au nom de nos valeurs, mais aussi de nos intérêts nationaux, à ce qu’Israël soit un pays sûr, et demeure un pays stable. Un Israël stable est la clé de la stabilité du Moyen-Orient, et sur ce point, Monsieur le Premier ministre peut toujours compter sur nous.
Je dois également dire quelques mots sur nos relations bilatérales, sujet que nous avons également abordé. Israël est un investisseur important en Hongrie. Aujourd’hui, 150 entreprises israéliennes y sont implantées, employant plusieurs milliers de personnes. Ce sont des investissements précieux, non seulement par leur volume, mais aussi par leur qualité, car ils se concentrent principalement dans des secteurs stratégiques comme l’industrie pharmaceutique et les technologies de pointe. La coopération entre les milieux d’affaires hongrois et israéliens fonctionne bien, et nous avons de solides raisons d’espérer qu’elle se poursuivra dans les années à venir. Notre coopération s’étend également à l’un des domaines les plus importants et les plus sensibles : la coopération en matière de défense, de sécurité militaire et d’industrie de l’armement.
La Hongrie a acquis et intégré de nombreuses technologies israéliennes dans son système de défense, et nous entendons poursuivre cette coopération à l’avenir. Les exportations hongroises vers Israël représentent pour nous un enjeu significatif. Nous nous réjouissons qu’Israël n’ait jamais mis le moindre obstacle à l’exportation de produits hongrois vers son territoire, et nous lui en sommes reconnaissants.
Enfin, je dois également évoquer l’un des sujets les plus actuels : les récents changements survenus dans le système judiciaire international. Et en premier lieu, je dois parler de la Cour pénale internationale. Monsieur le Premier ministre, je me considère comme un connaisseur en la matière. Voici une petite histoire, une histoire hongroise, mais importante pour nous. C’est moi qui, en tant que Premier ministre, ai signé en l’an 2000 l’acte d’adhésion de la Hongrie à la Cour pénale internationale. Et c’est moi également qui, ces derniers jours, ai signé le document officialisant notre retrait, car la Hongrie, le gouvernement hongrois, a décidé de quitter cette institution. La raison de cette décision est que nous sommes arrivés à la conviction que cette Cour s’est transformée en une institution à caractère politique. Ces dernières années, elle n’a plus fonctionné comme une juridiction impartiale, fondée sur l’État de droit, mais comme un tribunal animé par des considérations politiques. Ce sont surtout les décisions prises à l’encontre d’Israël qui en ont apporté la démonstration la plus claire. Nous considérons qu’un État de droit démocratique digne de ce nom, tel que la Hongrie, ne peut pas, ne doit pas participer à une instance judiciaire internationale qui agit sur la base de motivations politiques.
Je suis convaincu que cette instance judiciaire internationale, pourtant importante en soi, a été dévoyée et réduite au rang d’instrument politique. Dans ces conditions, nous ne pouvons pas, et nous ne voulons pas, continuer à y être associés dans la période à venir. Le ministre des Affaires étrangères déposera aujourd’hui même devant le Parlement hongrois le projet de loi relatif à notre retrait. La Hongrie se retire donc du Statut de Rome, autrement dit, nous dénonçons le Statut de Rome.
Monsieur le Premier ministre,
Je réitère nos vœux les plus sincères.
Nous vous saluons respectueusement, non seulement au nom du gouvernement hongrois, mais également au nom du peuple hongrois. Merci d’être venu jusqu’à nous. Merci pour l’amitié que l’État d’Israël a témoignée à l’égard de la Hongrie au cours des dernières années. Merci pour la coopération que nous avons pu entretenir sur la scène internationale. Merci égalementt pour le soutien que vous apportez à la communauté juive vivant en Hongrie. Et nous sommes fiers que cette communauté, qui a traversé bien des épreuves, une histoire lourde et douloureuse, puisse aujourd’hui non seulement se sentir chez elle en Hongrie, mais aussi se considérer comme une communauté précieuse. Car c’est ainsi que nous la considérons : comme une communauté précieuse dans notre pays.
Votre visite n’est donc pas seulement un événement politiquement important, comme en témoigne l’intérêt qu’elle suscite dans la presse, mais elle revêt aussi, pour nous, une dimension personnelle, spirituelle, et, si l’on peut dire ainsi, une portée civilisationnelle. Je réaffirme qu’Israël pourra continuer à compter sur la Hongrie à l’avenir, en tant que bastion imprenable de la culture judéo-chrétienne en Europe, un bastion que nul adversaire ne saurait renverser.
Je vous remercie de votre attention.