Zsolt Törőcsik : Aujourd’hui s’achève Voks2025, la consultation sur l’adhésion accélérée de l’Ukraine à l’Union européenne. Plus de deux millions de citoyens ont déjà exprimé leur opinion sur la question de savoir s’ils soutiennent ou non l’entrée de notre voisin de l’Est dans l’Union européenne. Je vais également demander au Premier ministre Viktor Orbán ce que le gouvernement compte faire du résultat. Bonjour.
Bonjour.
Que doivent garder à l’esprit ceux qui hésitent encore à remplir leur bulletin ? Quel est l’enjeu, en ce dernier jour de la consultation ?
Je leur propose un raisonnement simple. Si plus de deux millions de personnes ont jugé cette question importante, alors elle l’est vraiment. Donc ceux qui n’ont pas encore voté devraient écouter ceux qui l’ont fait. Nous parlons d’un sujet pour lequel plus de deux millions de citoyens, sans même connaître encore la répartition des avis, ont déjà dit : « C’est important pour moi, je veux donner mon avis et je veux que les dirigeants du pays sachent ce que je pense. » Et si c’est important pour deux millions de personnes, alors cela devrait l’être pour le troisième, le quatrième, le cinquième million également. Je conseille donc aux électeurs de suivre l’exemple de leurs concitoyens qui ont déjà voté. Nous parlons de la question la plus cruciale pour l’avenir et la voie que prendra la Hongrie dans les prochaines années.
Pourtant, cette semaine, Zoltán Tarr, député européen du parti Tisza, a déclaré que cette consultation était totalement inutile. Selon vous, quelle est la valeur réelle de ces deux millions de votes, ou plus, selon le résultat final ?
Voyons cela sous un autre angle. Imaginons un agriculteur du comitat de Békés, assis sur son tracteur, travaillant chaque jour. S’il réfléchit à son avenir, aux opportunités et aux risques qui l’attendent, il devrait se demander : si l’Ukraine rejoint l’Union européenne – ce que toute l’Union pousse à réaliser, le Parti Tisza, la DK, le Parti populaire européen, les socialistes, Von der Leyen, la Commission, tout ce grand bloc majoritaire – eh bien, si cela se fait d’ici 2030, cela signifie que la majeure partie, voire la totalité, des aides directes à l’agriculture disparaîtront, car l’argent ira en Ukraine. Ou il peut se dire que si l’Ukraine entre dans l’UE et que le blé ukrainien bon marché inonde le marché, lui pourra produire du blé ici, mais pour le vendre à un prix correct, ce sera une autre histoire : impossible de concurrencer le prix du blé ukrainien, toujours moins cher. Ou encore, un serveur de Budapest peut penser à ceci : si entre 2026 et 2030 l’Ukraine rejoint l’Union, et qu’il gagne aujourd’hui 600 000 ou 700 000 forints, le gouvernement hongrois ne pourra plus empêcher l’arrivée de centaines de milliers de travailleurs ukrainiens. Nous disposons encore de ce moyen, je peux encore empêcher tout cela. Mais une fois membres, je ne pourrai plus. Et alors, le travail qu’il accomplit pour 600-700 000 forints sera effectué par un Ukrainien pour 500 000, et il perdra son emploi. Et ce ne sont pas cinq Ukrainiens qui viendront, mais plusieurs centaines de milliers, étant donné l’énorme écart de salaire. Et des millions de personnes vivent encore en Ukraine sans perspective d’emploi sur place. Voilà le genre de danger concret, direct, pour notre vie quotidienne que représente l’adhésion de l’Ukraine. C’est à cela qu’il faut réfléchir quand nous parlons de Voks2025.
Vous avez également mentionné que tout l’appareil bruxellois et une grande partie des forces politiques poussent pour que l’Ukraine devienne membre au plus vite. Cette semaine, un responsable de la future présidence danoise de l’UE a même déclaré qu’il allait œuvrer en ce sens au cours des six prochains mois. Si Bruxelles est si déterminé, en quoi l’opinion des Hongrois peut-elle vous aider, notamment au sommet européen de la semaine prochaine ?
Le sommet européen de la semaine prochaine sera un moment difficile, je le sens aux signaux déjà visibles. Bien sûr, même dans ce genre de bataille rude, il y a une forme de beauté : il y aura un grand débat, j’espère qu’il restera dans des limites intelligentes, mais ce n’est pas toujours le cas, parfois la tension monte. Dans ces moments-là, j’ai besoin de deux choses. La première, je l’ai : l’expérience. C’est un grand atout pour moi et pour la Hongrie. Parmi tous les dirigeants présents, c’est le gouvernement hongrois qui est en place depuis le plus longtemps ; et moi le Premier ministre depuis le plus longtemps. Je sais comment c’était en 2010, et même en 1998–2002. Les autres étaient ailleurs, parfois même pas encore dans la politique. Mon expérience m’est d’un grand secours : après tant d’années, je sais toujours trouver les bons repères. Après tout, j’ai été témoin direct : je sais quand nous avons pris de bonnes ou de mauvaises décisions. Si l’on garde son sang-froid, ce que je m’efforce toujours de faire : maintenir une sérénité stratégique, alors c’est un atout majeur. Mais l’autre chose dont j’ai besoin, c’est de la force. Ce qui compte, ce n’est pas ce que pense le Premier ministre hongrois, c’est peut-être intéressant, mais ce n’est pas cela qui est important. Ce qui compte, c’est ce que pensent les Hongrois ; et ça, ce n’est pas juste intéressant, c’est incontournable. Quand je prends la parole au nom de la Hongrie, ce n’est pas la même chose si je porte uniquement la position du gouvernement ou si je représente clairement la volonté d’un peuple exprimée concrètement, comme avec Voks2025. C’est une force réelle : nous ne sommes peut-être que dix millions face aux 84 millions d’Allemands, mais la force d’un peuple, elle, ne se contourne pas, ne se saute pas, ne se balaie pas. Avec l’expérience et la force, nous pouvons obtenir des résultats à Bruxelles.
Parlons aussi de l’aspect intérieur et du calendrier de ce vote. Ces derniers jours, le président du parti Tisza a déclaré que le Tisza non plus ne soutient pas l’adhésion accélérée de l’Ukraine à l’Union européenne, ce qui laisse penser qu’il existe une certaine unité sur ce point. Mais il a ajouté qu’une fois les négociations d’adhésion bouclées et les conditions connues, ils proposeraient alors un référendum. À votre avis, et selon le gouvernement, pourquoi faut-il prendre une décision maintenant sur cette question, pourquoi ne pouvons-nous pas le faire plus tard ?
Parce que tout se joue maintenant. Je respecte ceux qui viennent d’entrer en politique et sur la scène internationale, c’est toujours sain qu’il y ait du renouvellement, mais l’expérience et les faits comptent aussi. Quand l’Union européenne emprunte une voie, impossible de l’arrêter. C’est un rouleau compresseur : une fois qu’il est lancé, il avance à son rythme et écarte tout sur son passage. Je vais vous donner un exemple. Je me souviens quand l’Union européenne a voulu instaurer de nouvelles règles : les Français et les Néerlandais ont même voté contre par référendum. Ils ont attendu un an, ont reformulé, ont travaillé l’opinion publique, et ils ont fini par l’imposer. Ce que je veux dire, c’est qu’il ne faut jamais sous-estimer l’Union européenne. Dans l’UE, pour bloquer quelque chose, il faut empêcher le processus de démarrer. Une fois lancé, on peut éventuellement en atténuer certains aspects, mais le rouleau compresseur ira jusqu’au bout. Donc ceux qui croient que nous pourrons nous décider « plus tard » ne connaissent tout simplement pas la politique européenne : ils n’ont jamais vu ça de leurs propres yeux.
Comment évaluez-vous les tentatives de pression, tant internes qu’externes, autour de Voks2025 au cours de ces dernières semaines et mois ?
Il faut replacer cela dans le même contexte que toute la vie politique hongroise. Et d’ailleurs, ce n’est pas qu’en Hongrie. Je discutais récemment en France, avant cela en Espagne, et je vais bientôt me rendre aux Pays-Bas : partout, c’est le même schéma. Il existe deux grandes forces politiques. D’un côté, les forces patriotes, nationales : elles refusent l’immigration, ne veulent pas céder de compétences à Bruxelles, et rejettent l’adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne. De l’autre côté, ceux qui veulent exactement l’inverse : ils poussent pour l’adhésion de l’Ukraine, tolèrent ou encouragent l’immigration, sont prêts à transférer toujours plus de pouvoirs à Bruxelles, et estiment que c’est à Bruxelles de dire aux États membres quoi faire. Dans chaque pays, on retrouve à peu près cette même configuration. C’est également le cas en Hongrie. Et comme aujourd’hui, en Europe, ce sont majoritairement ces partis pro-Ukraine, pro-migrants, pro-Bruxelles qui détiennent les leviers de pouvoir, cela met une pression énorme sur les pays dirigés par des gouvernements nationaux comme le nôtre. Ils veulent nous forcer à céder davantage de compétences, à aligner notre politique économique sur celle dictée par Bruxelles – nous avons vu cette semaine à quel point ce sujet est d’actualité, nous aurons peut-être le temps d’en parler –, à accepter leur réglementation migratoire, à ouvrir nos portes non seulement à l’Ukraine dans l’UE, mais peut-être même dans l’OTAN. Bref, nous subissons une pression colossale. Mais c’est, disons-le, le climat « normal » de la politique européenne aujourd’hui. D’un côté : les patriotes, les gouvernements nationaux. De l’autre : les fédéralistes, les pro-Bruxelles, les pro-Ukraine.
Le gouvernement estime que faire entrer l’Ukraine, c’est aussi importer la guerre en Europe. Mais dans notre environnement élargi, il y a aussi un autre conflit : entre Israël et l’Iran. Même les analystes peinent à dire s’il faut déjà parler de guerre. Comment évaluez-vous la menace que cela représente pour la Hongrie ? Nous parlons beaucoup de l’énergie, mais il y a aussi des aspects de sécurité, non ?
Une réponse plus longue serait nécessaire, mais nous n’avons ni le temps ni le cadre pour cela. Le cœur du problème, c’est l’Iran. C’est un pays très particulier : au-delà du fait qu’il dispose d’une armée immense et qu’il incarne une branche spécifique de l’islam, il est situé sur des routes stratégiques. Il contrôle un détroit par lequel passe 20 à 30 % du commerce mondial, et une part encore plus importante du commerce pétrolier. L’Iran développe également ses capacités nucléaires : bref, c’est une puissance majeure, forte de plus de 90 millions d’habitants. Mais ce que nous savons moins, c’est que l’Iran est ethniquement hétérogène. Certes, les Perses y sont majoritaires, un peu plus de 50 %, mais à côté, il existe d’autres groupes ethniques, souvent concentrés en blocs territoriaux, un peu comme nos Hongrois dans le Pays sicule. Si le pouvoir central iranien venait à s’effondrer, c’est tout le pays qui risquerait de se disloquer, entraînant une déstabilisation majeure. Prenez l’exemple de l’Azerbaïdjan : 10 millions d’habitants aujourd’hui, mais 20 millions d’Azéris vivent en Iran. Le premier est un État laïque, tourné vers l’Europe, très proche de nous sur bien des aspects ; les seconds relèvent d’une communauté fondamentaliste religieuse. Donc si l’Iran s’effondre, ce ne sera pas un seul foyer de guerre, mais une instabilité qui se diffusera à plusieurs pays voisins. Le Pakistan est dans la même situation. Le vrai danger, c’est qu’une vaste région du monde devienne ingouvernable et échappe à tout contrôle.
Quelles leçons devons-nous en tirer ici, en Hongrie ?
Bien sûr, nous regardons chaque jour le prix du pétrole, c’est passionnant. Mais il faut aussi avoir une vue d’ensemble sur une semaine ou un mois. Sur le seul mois écoulé, le prix du baril de Brent a grimpé de 20 %. Voilà. Et comme la Hongrie dépend des importations – énergie, carburant, pétrole, gaz –, toute hausse du prix mondial du pétrole est une mauvaise nouvelle pour nous. La guerre fait grimper les prix. Autrement dit, la guerre, pour les Hongrois, c’est toujours une mauvaise nouvelle.
Le gouvernement affirme que dans la situation actuelle, le plan de Bruxelles, selon lequel l’Union européenne, et donc la Hongrie aussi, devrait renoncer au gaz et au pétrole russes d’ici fin 2027, relève d’un suicide économique. L’autre camp rétorque qu’il reste encore deux ans et demi pour s’y préparer. Pourquoi le gouvernement estime-t-il que ce plan aurait un impact aussi radical, voire immédiat ?
À cause des chiffres. Si nous ne pouvons plus importer de gaz de Russie, alors la facture énergétique des familles et des entreprises, mais surtout celle des familles, va augmenter de deux fois et demie. Quelqu’un qui payait 30 000 forints paiera 70 000. C’est une opération mathématique, pas de la politique. C’est ce qui se passera. Pourquoi voudrions-nous cela ? L’Union européenne, Bruxelles, veut imposer quelque chose qui est contraire aux intérêts des Hongrois. Pourquoi devrions-nous l’accepter ? Nous devons défendre nos intérêts !
De quels moyens dispose le gouvernement pour cela ? Vous avez dit, après la réunion de mercredi, que le conseil des ministres s’était largement consacré à trouver comment contrer ces plans bruxellois.
Jusqu’à présent, ça fonctionnait ainsi : l’importation d’énergie russe vers l’Europe était limitée par des sanctions. Pour imposer ces sanctions, ces interdictions, implique l’unanimité, donc le vote des Hongrois est également nécessaire. Nous avons dit : très bien, si vous voulez vous tirer une balle dans le pied, libre à vous, mais pas question de nous forcer à faire pareil. Donc ces restrictions ne devaient pas s’appliquer à la Hongrie. Et j’ai mis mon veto, jusqu’à ce qu’ils finissent par accepter une clause d’exception : oui, sauf pour la Hongrie. Au passage, nous avons embarqué les Slovaques et les Tchèques avec nous, puisqu’eux non plus n’ont pas de littoral. Le vrai problème concerne les pays qui n’ont pas d’accès maritime et qui ne peuvent recevoir l’énergie que par pipeline. Or nous dépendons des pipelines. Donc nous avons mis notre veto et nous avons obtenu une dérogation pour la Hongrie. Et maintenant, ils veulent nous l’enlever. C’est un droit que nous avons obtenu de haute lutte. Je ne vais pas répéter ici tout ce qui s’est dit lors de ces négociations, tout ne passerait pas le filtre d’un micro, mais finalement, nous avons gagné ce combat. Et maintenant, ils veulent le contourner par une ruse : dire que ce n’est plus une sanction, mais une mesure commerciale. C’est une tromperie flagrante, une manœuvre, une insulte à l’État de droit, et c’est Bruxelles qui en porte la responsabilité. Bref, voilà le nouveau champ de bataille, et nous allons nous battre.
Mais parallèlement, de plus en plus de voix à la Commission disent, un commissaire l’a encore répété cette semaine, qu’il faudrait remplacer l’unanimité par un vote à la majorité dans certains domaines, pour « exclure » (entre guillemets) les États qui bloquent. Que signifierait cela pour l’Union européenne si des décisions stratégiques pouvaient être imposées contre certains États membres ?
Cela signifierait la fin de la souveraineté hongroise. Pas la peine de tourner autour du pot. Notre État millénaire, tel que nous le connaissons – souverain, libre, maître de son destin –, n’existerait plus. Aujourd’hui, ce sont dix millions de Hongrois, et jadis quinze millions, qui décident de leur sort, dans leur propre pays, leur propre patrie. Mais demain, peut-être aurons-nous notre opinion, qui vaudra une voix, et si les autres sont plus nombreux, cette voix ne pèsera plus rien. Et ce ne sera plus Budapest, ni le Parlement et le gouvernement élus par les Hongrois, ni le peuple hongrois lui-même qui décideront de la politique étrangère et économique du pays, mais les bureaucrates de Bruxelles. Ce serait la fin de la souveraineté de l’État hongrois. Ce n’est pas une question technique ou juridique, c’est une question historique majeure.
Passons maintenant des décisions envisagées à celles qui sont déjà prises. Cette semaine, la Commission a engagé une procédure d’infraction contre la Hongrie à propos du plafonnement des marges commerciales, affirmant que cela oblige les magasins à vendre certains produits à perte. Dans une telle situation, le gouvernement doit-il défendre les intérêts des commerces ou ceux des consommateurs, des familles ?
Aujourd’hui, nous sommes engagés dans deux grandes batailles. Si nous mettons de côté le pétrole, le gaz et la guerre en Ukraine – ce qui n’est pas si simple – il reste la question du plafonnement des taux d’intérêt et celle de la régulation des marges. Concernant le plafonnement des taux : ils veulent nous forcer à l’abolir, parce que cela prive les banques de revenus. C’est vrai, nous infligeons une perte de quelque 55 milliards de forints aux banques, mais cet argent reste dans les poches des familles. Il y a 300 000 familles concernées : elles ont contracté des prêts, les taux ont explosé, et sans ce plafonnement, ces familles seraient ruinées. 300 000 familles ! D’après nos chiffres, 27 à 28 000 d’entre elles feraient faillite immédiatement. Elles seraient expulsées de leur logement. Donc, concrètement, nous protégeons 28 000 familles contre l’expulsion, et 270 000 autres contre des intérêts insupportables. Je ne comprends pas pourquoi Bruxelles ne veut pas entendre ça. Ce plafonnement est indispensable ; mais, bien sûr, nous pouvons nous demander : jusqu’à quand ? Nous en avons besoin tant que la Banque nationale n’est pas en mesure de de réduire les taux d’intérêt en Hongrie par le biais du taux directeur. Quand les taux redeviendront supportables pour ces familles, nous pourrons lever ce plafonnement, mais pas avant, car sinon elles seraient ruinées. Voilà notre premier bras de fer avec Bruxelles. Il s’agit ici de l’argent des banques. Bruxelles dit : « Ces 300 000 familles hongroises, on s’en moque, cet argent revient aux banques rendez-le-leur. » Nous sommes également en conflit avec les banques, qui, de leur côté, ont même saisi la Cour constitutionnelle hongroise pour contester notre mesure. Donc, sur ce point, nous avons également un conflit interne. La deuxième grande bataille concerne la régulation des marges. Imaginez : vous entrez dans un magasin aujourd’hui et vous payez déjà un prix. Un prix qui est déjà injustement élevé actuellement. Sans régulation, demain, le même produit alimentaire vous coûterait 20 % de plus. Faites le calcul. C’est un fardeau énorme pour les familles. Donc oui, le gouvernement intervient dans la formation des prix, et dit aux commerçants – surtout aux grandes chaînes internationales – : « Voici une limite : sur le coût de production alimentaire, vous ne pouvez pas rajouter plus de 10 % de marge, 15 % pour certains produits. Il n’est pas possible de gagner davantage. » Évidemment, ils veulent gagner plus. Mais pour moi, ce profit supplémentaire est injustifié. Je comprends qu’un commerçant veuille faire du bénéfice : c’est le principe du commerce. Mais au-delà d’un certain seuil, cela détruit les citoyens, et tout simplement, cause un préjudice économique aux familles. Dans un monde aussi chaotique que celui-ci, le gouvernement hongrois doit intervenir pour protéger le pouvoir d’achat des familles. Cela veut dire quoi ? Que le profit des multinationales est réduit, au profit des familles. Elles ne peuvent pas ponctionner plus d’argent en gonflant les prix. Les multinationales ne récupèrent pas suffisamment d’argent, moins de profit pour elles, moins d’argent à retirer du pays. Et Bruxelles est toujours du côté des multinationales. Voilà pourquoi il est essentiel qu’il existe un État hongrois, un gouvernement national : sinon, Bruxelles défendrait toujours les intérêts des grands groupes, et nous serions dépouillés de ce que les familles hongroises ont épargné au cours des quinze dernières années. Le plafonnement des marges, c’est simplement un outil pour maintenir les coûts de la vie à un niveau supportable et freiner l’inflation, en limitant les profits excessifs : cela profite aux familles hongroises. C’est cela que Bruxelles veut nous enlever. Ils nous ont ordonné d’y renoncer ; comme nous avons refusé, ils ont ouvert une procédure. Nous allons débattre âprement ; nos positions ne vont pas se rapprocher. Ensuite, ils nous poursuivront devant la Cour de justice de l’Union européenne. Cela prendra du temps. Espérons qu’entre-temps, les prix se normaliseront, et que ce conflit n’aura plus d’impact pour les familles hongroises.
Restons encore un instant sur les questions économiques. En effet, cette semaine, l’Assemblée nationale a adopté le budget de l’année prochaine, que vous avez présenté comme un budget centré sur les familles et que vous qualifiez aussi de budget anti-guerre. Pourtant, sur le terrain, nous constatons que la guerre ne montre toujours aucun signe d’apaisement. Que se passera-t-il si la guerre perdure ? Comment le gouvernement pourra-t-il tenir les engagements inscrits dans ce budget ?
Nous ne pourrons répondre à cette question que quand nous y serons confrontés. Cette menace dont vous parlez est au-dessus de nos têtes. Si le monde venait à s’embraser, il faudrait bien sûr adapter un budget conçu pour une période de paix. Mais nous avons tout fait pour qu’il soit suffisamment flexible pour pouvoir nous ajuster si besoin. Mais ce budget est aussi – comment dire ? – un budget de la volonté. On pourrait faire un budget en se disant : à une époque pareille – menaces de guerre mondiale, Israël et l’Iran en guerre, le conflit russo-ukrainien à nos portes, les Américains qui veulent la paix mais l’Union européenne qui, elle, veut continuer la guerre en Ukraine et entraîne toute l’Europe dedans au lieu de suivre Washington –, dans un tel contexte, nous pourrions nous contenter de dire : « Au lieu de définir des objectifs, gardons ce que nous avons, c’est déjà bien ». Et ce serait une position tout à fait compréhensible et défendable. Mais ce n’est pas notre façon d’être. Nous, les Hongrois, même en période difficile, nous fixons des objectifs. Et ce n’est pas seulement moi, mais aussi, disons, la communauté pro-gouvernementale, et peut-être puis-je dire que nos électeurs ensemble, nous fixons des objectifs même en ces temps difficiles, ils attendent de nous que nous fixions des objectifs. Et la vérité, c’est que nous avons fixé des objectifs ambitieux. Dès le début de l’année, j’ai annoncé que nous ne resterions pas les bras croisés à attendre de voir comment le monde évoluerait : nous fixons des buts et nous les atteindrons. Le budget pour 2026 en est la preuve. Et à partir de juillet, on ne va plus seulement en parler : cela va se voir concrètement. Depuis six mois, j’en parle, mais à partir du 1er juillet, les gens vont le ressentir : nous augmentons de 50 % l’avantage fiscal pour enfants. Cela sera déjà visible sur les salaires versés en août. À partir du 1er juillet également, nous rendons le l’allocation pour soins aux enfants (GYED) et l’allocation pour soins aux nourrissons (CSED) exonérées d’impôt : à partir du 1er août, ce sera effectif. En octobre, nous augmenterons de 15 % les salaires des employés municipaux dans les communes de moins de 10 000 habitants, et à partir de janvier, encore +15 %. Et je travaille pour que nous puissions étendre cela aux communes jusqu’à 30 000 habitants. En janvier, nous augmenterons à nouveau de 50 % l’avantage fiscal pour enfants, et ceux qui ont au moins deux enfants seront exonérés de l’impôt sur le revenu pour le reste de leur vie. Ce sont des objectifs énormes. Voilà ce que nous avons décidé. Il y a peut-être la guerre, et mille menaces, mais je tiens, et je tiendrai, coûte que coûte à atteindre ces objectifs. Il y a certes des difficultés économiques, tout n’est pas parfait, mais pour les familles hongroises, ces objectifs sont essentiels et le gouvernement doit les réaliser. Et ces objectifs sont gravés dans la loi budgétaire : à partir de là, ce n’est plus une simple promesse du gouvernement, c’est une obligation légale. Nous le ferons, et ce sera une bonne chose.
J’ai interrogé Viktor Orbán, Premier ministre de Hongrie, sur Voks2025, l’interdiction des énergies russes par l’Union européenne et d’autres questions économiques.