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Déclaration à la presse de Viktor Orbán lors de la signature de l’accord sur l’allègement de la fiscalité des entreprises entre le gouvernement hongrois et la Chambre hongroise du commerce et de l’industrie

Zoltán Kovács : Bonjour Mesdames et Messieurs, je vous souhaite la bienvenue à notre événement, au cours duquel sera signé l’accord renouvelé entre le gouvernement hongrois et la Chambre hongroise du commerce et de l’industrie, portant sur la fiscalité. Je souhaite la bienvenue à Monsieur Viktor Orbán, Premier ministre de la Hongrie, à Monsieur Elek Nagy, président de la Chambre hongroise du commerce et de l’industrie, ainsi qu’à l’ensemble de nos invités ! Je donne d’abord la parole à Monsieur Elek Nagy, président de la Chambre, pour sa déclaration.

Ainsi c’est très bien, mais nous avions convenu de faire l’inverse.

Zoltán Kovács : Dans ce cas, faisons comme convenu.

Merci beaucoup.

Elek Nagy : Si nous procédons ainsi, c’est parce que, la dernière fois, nous avons instauré une tradition : c’est le Premier ministre qui ouvre la séance. Et lorsqu’une formule fonctionne, mieux vaut ne pas y toucher ; c’est ce que nous avons convenu avec Monsieur le Premier ministre.

C’est la première raison. La seconde, c’est qu’il m’aurait fallu accomplir une tâche difficile, et je ne suis pas sûr d’y parvenir. En effet, nous sommes aujourd’hui dans une ambiance sombre, presque de deuil, et il me faudrait vous parler de sujets importants et positifs. Ce n’est pas chose aisée. Nous vivons une matinée difficile. Hier soir, c’est tout le pays qui a reçu comme une balle dans les poumons, ou un infarctus. Mais ce matin, lorsque nous en avons discuté avec Monsieur le Président, nous sommes tombés d’accord sur une chose : on ne vit pas de lamentations. Il y a du travail, et le travail doit être fait. Et quoi qu’il se soit passé dimanche après-midi, la journée de lundi était fixée pour notre accord entre la Chambre de commerce et d’industrie et le gouvernement hongrois. Donc, comme il s’agit d’une situation délicate du point de vue dramaturgique, et que je suis plus homme de scène que Monsieur le Président, j’ai pensé qu’il valait mieux que je commence cette conférence de presse, bon sang de bois.

Je voudrais donc d’abord dire quelques mots sur le contexte de cet accord. Depuis trois ans, depuis le début de la guerre, le gouvernement est confronté à un dilemme extrêmement difficile, qui devient chaque jour plus pressant. Nous voyons tous que l’Europe marche vers un état de guerre. Même vous qui n’êtes pas assis autour des tables de négociation mais n’en entendez que les échos, vous pouvez l’observer. La rhétorique devient de plus en plus brutale, de plus en plus ouvertement guerrière. Nous en sommes au point où des expressions comme « économie de guerre » sont devenues monnaie courante dans la politique européenne, et où l’on entend sans réaction des déclarations telles que : « En 2030, nous devons être prêts à mener une guerre. » Cela ne suscite plus l’ombre d’un étonnement : ce sont devenus des propos politiques ordinaires. Or cela a des conséquences lourdes sur la politique économique, car une politique économique ne porte pas uniquement sur l’immédiat, mais sur l’avenir : il faut savoir à quoi se préparer. Toute politique économique repose sur un plan. Or, aujourd’hui, la vérité est que l’Union européenne admet ouvertement que son plan est la construction d’une économie de guerre. Des documents sont adoptés en ce sens, et les dirigeants s’expriment ainsi. Cela inclut beaucoup de choses : Vous connaissez l’adhésion envisagée de l’Ukraine à l’Union, le maintien d’une armée ukrainienne gigantesque, entre 800 000 et un million d’hommes, financée par l’UE, et la réorientation de 20 à 25 % du prochain budget européen de sept ans vers l’Ukraine. Les implications financières de cette logique sont considérables. La Hongrie est donc confrontée à un dilemme : comment répondre à cette situation ? Devons-nous accepter que l’Europe adopte une économie de guerre, et nous y intégrer, en essayant d’en tirer le meilleur possible ?

Ou bien refusons-nous ce cadre, et nous posons-nous la question suivante : est-il possible, alors que l’Union entière s’oriente vers une économie de guerre, de rester à l’écart et de bâtir une autre politique économique, non pas bruxelloise, mais nationale ? C’est cela, le grand dilemme. En réalité, même lorsqu’une décision est prise et qu’une orientation est choisie, l’évolution permanente des événements impose de la réviser régulièrement afin de déterminer si le choix initial reste pertinent. Nous avons, il y a quelque temps déjà, avec le ministre de l’Économie, Márton Nagy, choisi une orientation : nous avons jugé que la Hongrie était capable de suivre une politique économique nationale, et non pas une politique de guerre dictée par Bruxelles. Mais les événements évoluent sans cesse, et cette décision doit être régulièrement réexaminée. À l’occasion de nos discussions actuelles avec la Chambre sur la fiscalité, le gouvernement a remis cette question à l’ordre du jour. Nous en avons longuement parlé avec le ministre Nagy, et nous sommes arrivés à la conclusion suivante, qui est la base de l’accord d’aujourd’hui : oui, il est possible de poursuivre une politique économique qui ne s’oriente pas vers la guerre, mais vers les intérêts nationaux de la Hongrie. Nous maintenons cette position, même si, évidemment, nous ne pouvons pas nous soustraire aux effets de la guerre. En Hongrie, il n’y a pas vraiment un débat technique à ce sujet, mais plutôt une querelle politique concernant l’impact de la guerre sur l’économie. Selon moi, aucun esprit raisonnable ne peut contester que la guerre nuit à l’économie hongroise comme à celle de l’Union européenne. Et pourtant, même avec une croissance bridée par la guerre, le gouvernement affirme que nous pouvons et devons maintenir notre politique économique nationale, non guerrière. Cela signifie que nous ne renonçons pas aux objectifs que nous nous sommes fixés. Je ne vais pas entrer dans les détails : vous les connaissez, ils figurent dans la loi de finances et dans les décisions gouvernementales rendues publiques, les allègements fiscaux, le programme Otthon Start, le 14ᵉ mois de pension, et ainsi de suite. Nous ne sommes pas réunis aujourd’hui pour cela, mais pour examiner ce que tout cela implique pour les entrepreneurs hongrois. Car lorsque nous disons que nous ne renoncerons pas à nos objectifs, cela signifie que nous avons promis, et convenu avec les entrepreneurs, de réduire leur charge fiscale et la bureaucratie qui les accable. Nos discussions ont atteint une phase importante : nous avons trouvé un accord sur 11 points avec la Chambre de commerce et d’industrie.

Nous sommes ici pour vous les présenter. Comme vous le savez, j’ai déjà fait une annonce importante avec le Président Elek Nagy, concernant le crédit subventionné à taux fixe de 3 %. C’était la première étape. La deuxième étape, c’est celle d’aujourd’hui, et d’autres suivront. Dans cette deuxième phase, à la demande de la Chambre, nous concluons un accord représentant, selon nos estimations, entre 80 et 90 milliards de forints de réductions et de simplifications fiscales. Il s’agit de 11 mesures. Je vais les résumer brièvement.

La première mesure concerne l’augmentation progressive du seuil d’exonération de TVA pour les assujettis. La Chambre a demandé que nous ne prenions pas seulement des décisions pour une année, mais que, dans la mesure du possible, nous fournissions également des prévisions pour la deuxième et la troisième année, dans un souci de prévisibilité, et que nous nous mettions d’accord. Nous convenons donc qu’en 2026, le seuil sera porté à 20 millions de forints, en 2027, à 22 millions et en 2028, à 24 millions. Ce sont là d’excellentes nouvelles : cela n’augmente pas la charge, mais les avantages accessibles.

Deuxième point : nous augmentons le taux forfaitaire de frais déductibles pour les régimes d’imposition simplifiés. Ici aussi, l’accord porte sur trois ans : 45 % en 2026, 50 % en 2027 et nous poursuivons encore les discussions pour 2028.

Troisièmement, nous réduisons l’assiette du prélèvement social pour les entrepreneurs individuels à titre principal. Selon nos calculs, cela allègera la charge mensuelle de 140 000 entrepreneurs.

Quatrièmement, nous élargissons le champ des entreprises éligibles au régime de la petite entreprise (KIVA). Cela permettra à 4 000 à 5 000 entreprises supplémentaires d’intégrer ce régime avantageux. Je le répète : nous élargissons le champ des entreprises éligibles au régime de la petite entreprise. Cela permettra à 4 000 à 5 000 entrepreneurs et moyennes entreprises d’entrer dans la catégorie des petites entreprises. Cela présente des avantages.

Cinquième point : nous accorderons un avantage fiscal de 100 millions de forints pour soutenir la dépollution des sites et les investissements verts. En langage clair, cela signifie que lorsqu’une entreprise réalise un projet en friche industrielle, un projet brownfield, et qu’elle doit réduire l’impact environnemental ou réparer des dommages antérieurs, elle pourra déduire ces dépenses de ses impôts. Nous attendons de cette mesure qu’elle donne un nouvel élan au développement des friches industrielles.

Sixième point : nous accorderons un avantage fiscal aux fournisseurs d’énergie opérant en Hongrie pour moderniser les infrastructures. Certains secteurs de l’industrie hongroise dégagent des profits très élevés, et nous les soumettons à des taxes supplémentaires : il s’agit notamment des banques, des grands fournisseurs internationaux d’énergie et, plus largement, des grandes entreprises. Nous les faisons contribuer davantage à la charge publique au-delà de l’imposition générale. Or ces entreprises nous disent aujourd’hui : très bien, mais l’absence d’investissements énergétiques et d’infrastructures freine désormais la croissance des entreprises. C’est pourquoi, à la demande de la Chambre, nous allons encourager les grands fournisseurs d’énergie, au moyen d’avantages fiscaux, à réaliser ces investissements et ainsi soutenir les entreprises. Tel était le souhait de la Chambre, et nous l’avons accepté. Nous attendons de véritables modernisations. Nous espérons vivement que chacun agira selon la logique économique : non pas pour accroître ses profits, mais pour augmenter l’ampleur des investissements réalisés dans les infrastructures énergétiques.

Septième point : Nous relevons les seuils d’imposition de la taxe sur le commerce de détail, ce qui, selon nos calculs, allégera la charge de 3 500 entreprises. Il s’agit bien du secteur du commerce de détail : les taux restent inchangés, nous n’y touchons pas ; ce sont les tranches d’imposition que nous relevons, ce qui permettra à 3 500 entreprises de bénéficier d’un régime fiscal plus favorable.

Huitième point : c’est à regret que j’ai accepté de repousser de six mois la hausse des droits d’accises sur les carburants. En Hongrie, la fiscalité est un système sensible : il est préférable qu’elle repose sur des principes clairs, afin d’éviter de devoir livrer sans cesse les mêmes batailles. On doit savoir qu’un principe existe, par exemple, que les droits d’accises augmentent en fonction de l’inflation. Cette hausse devrait entrer en vigueur le 1er janvier. La Chambre nous demande de ne pas l’appliquer. Je ne peux pas renoncer au principe lui-même, mais je peux en différer l’application de six mois. Nous nous reverrons à mi-année : si la demande de la Chambre demeure justifiée, nous pourrons envisager une nouvelle prolongation. Pour l’heure, nous reportons donc de six mois l’augmentation des accises sur les carburants, précisément à la demande de la Chambre. Cela représente pour le budget un manque à gagner de 20 milliards de forints.

Neuvième point : nous réduisons significativement les charges administratives pesant sur les entreprises. Concrètement : nous relevons de 5 à 20 millions de forints le seuil de paiement de l’acompte d’impôt sur les sociétés. Cela bénéficiera à 20 000 entreprises.

Dixième point : nous relevons le seuil permettant de recourir au bilan simplifié des microentreprises, de 150 à 180 millions de forints. Environ 10 000 entreprises pourront ainsi choisir une procédure administrative plus rapide et plus simple.

Et enfin, onzième point : pour 80 000 entrepreneurs individuels, nous mettons en place une réduction administrative spécifique. Cela signifie que, pour eux, l’administration fiscale effectuera automatiquement la déclaration des travailleurs assurés, et que la fréquence des déclarations du prélèvement social et des cotisations sera réduite à un rythme trimestriel. Le Président de la Chambre vous expliquera précisément ce que cela signifie et pourquoi c’est important.

Au total, nous parlons d’un effort budgétaire de 80 à 90 milliards de forints, financé par la majoration de la taxe bancaire. On voit bien qu’un débat est en train d’émerger, et qu’il va prendre de l’ampleur dans la politique économique hongroise. C’est un débat légitime, je n’ai aucune intention de le balayer d’un revers de main. Il porte sur la question suivante : peut-on encore accroître la taxe bancaire, et si oui, jusqu’à quel niveau ? Et comment établir un juste équilibre entre la fiscalité appliquée aux secteurs productifs et celle appliquée au secteur financier ? Nous connaissons évidemment les fondements de l’économie moderne : sans un système bancaire stable et performant, aucun système économique ne peut fonctionner. Mais nous cherchons malgré tout, les moyens de stimuler le plus possible l’activité de production grâce à des avantages fiscaux. La perspective du secteur financier est importante, mais pour nous, elle vient en second. Je vois d’ailleurs se dessiner une autre position, qui souhaite au contraire réduire la taxe bancaire, et compenser les recettes budgétaires ainsi perdues en diminuant les aides attribuées aux entreprises. Nous serons donc confrontés à deux orientations : l’une veut transférer des ressources du secteur financier vers le secteur productif ; l’autre veut faire l’inverse, c’est-à-dire alléger le secteur financier aux dépens du secteur productif. Il faudra sans doute trouver un équilibre raisonnable. Mais pour notre part, puisque nous défendons la politique du plein emploi, notre priorité reste la création d’emplois, et les emplois se trouvent principalement dans les secteurs productifs et les services. C’est pourquoi ces secteurs doivent passer en premier.

Pour conclure, je voudrais vous dire ceci : nous espérons signer encore plusieurs accords de ce type avec la Chambre dans les mois à venir. Nous avons bien compris que la Chambre a pris un nouveau cap, comme Monsieur Elek Nagy l’a expliqué à plusieurs reprises. Elle n’est plus la même qu’autrefois, et nous y voyons une opportunité. Jusqu’à présent, la Chambre participait surtout aux consultations sur les décisions de politique économique. C’était une bonne chose, et cela doit être poursuivi et même renforcé : la Chambre doit participer à l’élaboration de la politique économique. Mais désormais, son Président et son équipe s’engagent aussi à prendre part à la gestion même de l’économie. Nous espérons donc que notre prochain accord portera sur la manière de transférer, ou de partager, certaines missions de gestion économique de l’État avec la Chambre. Des discussions sont en cours dans différents groupes de travail. Je suis convaincu qu’à long terme, et particulièrement dans la situation instable que nous traversons, l’intérêt de l’économie hongroise est que la Chambre participe à la fois aux décisions de politique économique et à la gestion économique elle-même, et qu’elle dispose même de compétences décisionnelles propres.

Je remercie Monsieur le Président pour ces négociations concernant ce deuxième plan d’action, ainsi que pour leur issue positive. J’attends avec intérêt que nous puissions mener à bien et conclure celles portant sur le troisième plan d’action. Je suis persuadé que l’implication de la Chambre, de ses dirigeants et de ses commissions spécialisées jouera un rôle déterminant dans la gouvernance économique hongroise. Elle pourra même exercer une force de stabilisation indispensable, et la Hongrie en aura besoin dans la période qui s’annonce. Monsieur le Président, je vous remercie encore une fois pour cet accord.

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