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Discours de Viktor Orbán au Forum des Députés Hongrois du Bassin des Carpates

Je vous remercie. Il me revient aujourd’hui de livrer un état des lieux porteur d’optimisme, et qui invite à l’action. Je vais m’y essayer. Avant tout, je salue respectueusement Monsieur le Président de l’Assemblée. Je vous remercie de m’avoir invité ici.

Mesdames et Messieurs les Députés,

Quand nous parlons du Bassin des Carpates, et ce forum en porte le nom, alors il faut bien sûr citer Áron Tamási : « si nous sommes dans ce monde, c’est pour avoir un endroit qu’on puisse appeler chez nous. » Être ici, dans le Bassin des Carpates, c’est exister quelque part, cela suffit peut-être à d’autres, mais pour nous, cela ne suffit pas. Le Bassin des Carpates est pour nous bien plus qu’un simple lieu de résidence. Par les efforts, la sueur et le sang versé au fil des siècles, nous avons conquis le droit et gagné la dignité d’en faire le cadre et la finalité de toute notre existence.

Forum des Députés Hongrois du Bassin des Carpates : accordons toute son importance à ces quatre mots. Pour les Hongrois, le Bassin des Carpates n’est pas une simple notion géographique. Il est notre patrie historique, spirituelle et culturelle où nos rivières, nos montagnes et nos plaines portent en elles notre passé et façonnent notre avenir autant que notre patrimoine bâti. Vous êtes les députés hongrois du Bassin des Carpates, et à ce titre, vous êtes les membres d’une unité historique, spirituelle et culturelle. Votre mission ne prend pleinement sens que dans cette unité. D’où que vous veniez, vous représentez tous à la fois l’ensemble du Bassin des Carpates et l’ensemble de la nation hongroise. Cette responsabilité, nous la partageons depuis la Hongrie. Et c’est même notre devoir de la porter en premier.

Deuxième mot : Hongrois. Ce forum est celui des représentants hongrois du Bassin des Carpates. Cela signifie que nous sommes Hongrois. Que vous me permettiez de dissiper toute ambiguïté : la question n’est pas de savoir si Bartók est plus grand qu’Enescu – ça, c’est une question de libéraux. La nôtre est plus simple : lequel est hongrois ? Celui qui est hongrois est des nôtres. Cela dit bien que l’amour de la patrie n’est pas une question de raison, mais de cœur. Les conséquences de cette condition, du destin et de la mission qui en découlent, nous en parlons souvent, en de nombreux lieux. Je me contenterai ici d’énoncer quelques principes fondamentaux. Être Hongrois, c’est avoir sa langue pour âme ; si nous la perdons, nous perdons notre être. La survie du peuple hongrois n’est pas un acquis : il faut se battre pour elle, chaque jour. Qui protège la famille protège la Nation. Les frontières peuvent nous séparer, mais la Nation reste unie. L’enfant hongrois est le meilleur investissement dans l’avenir de la Nation. Être hongrois, c’est vivre dans un étau géopolitique : à l’ouest les Allemands, à l’est les Russes, au sud les musulmans. Être Hongrois, comme vous pouvez le constater, est une mission exigeante.

Troisième mot : Députés. Monsieur le Président, l’essence de la politique, c’est le courage et la responsabilité. La politique, vous le savez tous, est une question d’action. Et l’action requiert un mandat. C’est pourquoi il est si important qu’il existe une instance hongroise transnationale composée de députés élus démocratiquement. Des élus éprouvés, aguerris, prêts au combat. Nous nous réjouissons des succès électoraux remportés par les organisations hongroises de Transylvanie et de Voïvodine. Ces victoires démontrent la nécessité et l’efficacité d’une représentation politique fondée sur l’identité nationale.

Forum des Députés Hongrois du Bassin des Carpates. Le mot « forum » n’est pas anodin. Un forum est un lieu de débat. Pas comme au Parlement, où la discussion ressemble souvent davantage à un combat. Mais plutôt comme un espace de réflexion partagée, de recherche d’idées, d’intuitions et d’inspirations. Un lieu où nous cherchons ensemble la voie à suivre. C’est dans cet esprit que je souhaite m’adresser à vous aujourd’hui pour évoquer la situation de la Hongrie et de l’Europe. En effet, nous devons, sans doute presque exclusivement, parler ici du plus grand défi auquel fait face aujourd’hui la communauté hongroise du Bassin des Carpates : la guerre, ou plus précisément, la politique de guerre menée par Bruxelles, qui ne fait qu’attiser le conflit.

Mesdames et Messieurs les Députés,

Cette politique de guerre ne nous promet rien de bon. Elle compromet notre avenir. Elle rend l’énergie plus chère, et avec elle presque tout ce dont nous avons besoin au quotidien. C’est toute l’économie européenne qui en souffre aujourd’hui. Cette politique impose un fardeau immense à l’ensemble du continent, y compris aux pays du Bassin des Carpates. Elle détourne des ressources précieuses qui auraient pu servir au développement et aux investissements destinés à renforcer la coopération économique entre Hongrois de toute la région. Ce n’est pas l’Union européenne à laquelle nous avons choisi d’adhérer. Jusqu’ici, les succès ont assuré la légitimité de l’Union. C’est grâce à ces succès qu’elle s’est construite une identité : celle d’une communauté capable d’apporter paix et prospérité à un continent marqué par les tragédies du XXe siècle. Cependant, cette prospérité s’est évanouie. C’est une chose étrange à constater depuis l’Europe centrale, car ces pays sont plus riches que nous. Et pourtant, la légendaire qualité de vie de l’Occident a disparu. La qualité de vie ne peut être bonne là où il y a des migrants en masse et où le sentiment d’être chez soi s’est perdu. La qualité de vie ne peut être satisfaisante là où il faut payer deux à quatre fois plus pour son énergie qu’il y a à peine deux ou trois ans. Autrement dit, les réussites ne suffisent plus à légitimer l’Union. Il lui faut donc une nouvelle raison d’être. Et selon Bruxelles, ce nouveau projet européen serait une confrontation à l’Est avec la Russie.

Cette nouvelle identité européenne a besoin d’un moteur idéologique : l’alimentation d’une psychose collective autour de la guerre, dans l’esprit des citoyens européens. Selon la propagande pro-guerre, la Russie pourrait attaquer non seulement des pays voisins, mais aussi des États membres de l’Union européenne, voire de l’OTAN. Le danger russe face à l’ensemble de l’Europe est entretenu de manière continue. Selon la propagande bruxelloise, seule une frappe préventive pourrait arrêter la Russie, et dans leur logique, c’est précisément ce que représente la guerre en Ukraine. À leurs yeux, l’armée ukrainienne serait le dernier rempart qui empêche déjà aujourd’hui l’invasion de l’Europe par la Russie. Mais selon moi, cela ne tient pas. L’Europe peut très bien être défendue sans prolonger la guerre en Ukraine. Bruxelles espère également que la hausse des dépenses militaires et l’accélération de l’armement vont relancer l’économie. Dans leur vision, investir dans la guerre permettrait à la fois de renforcer la défense et de doper la compétitivité. Comme si l’armement pouvait engendrer la prospérité. En réalité, c’est un nouveau cycle économique, où nous finançons une guerre, simplement en dehors de notre territoire. L’Union européenne livre des armes à l’Ukraine, l’Ukraine les achète à crédit grâce à des prêts européens, et l’Union rachète les produits ukrainiens. Ils s’imaginent, ou du moins ils affirment, que ce mécanisme permettrait de contenir le conflit aux confins russo-ukrainiens, et de le tenir éloigné des frontières baltes, polonaises, slovaques, hongroises ou roumaines.

Mais, Mesdames et Messieurs les Députés, l’état de guerre sert aujourd’hui de prétexte à un tout autre projet : celui de pousser encore plus loin la centralisation de l’Union européenne, en éliminant tout élément souverainiste. C’est un déraillement de la logique même de l’intégration européenne, un véritable putsch institutionnel. La guerre russo-ukrainienne est devenue le catalyseur auquel Bruxelles se réfère pour réclamer de plus en plus de compétences au niveau communautaire. Les élites de l’Union prétendent que de nouvelles réponses européennes sont nécessaires, mais en les écoutant attentivement, on comprend que ces « nouvelles réponses » ne concernent plus la coopération, elles visent le transfert de compétences. Selon la position actuelle des dirigeants européens, le système fondé sur le consensus des 27 États membres serait trop lent pour faire face aux crises. (Je me permets ici une parenthèse : il y a une certaine ironie à constater que, pendant qu’en Hongrie les décisions prises à la majorité des deux tiers sont critiquées, à Bruxelles l’unanimité est considérée comme une menace.)

Mesdames et Messieurs,

Ce à quoi nous assistons aujourd’hui, c’est à la construction intellectuelle d’une Europe en guerre. C’est ce que je vois, ce que j’écoute, ce que j’observe en suivant les conférences qui se succèdent. Le monde des think tanks libéraux s’est mis au travail. Les analyses et prises de position se multiplient, toutes centrées sur la nécessité d’une centralisation accrue. Un institut influent, l’ECFR (European Council on Foreign Relations), a par exemple émis l’idée d’une « loi européenne de préparation à l’état d’urgence ». Une telle loi permettrait à l’Union, en cas de crise, de mobiliser les capacités industrielles de manière centralisée, de protéger les infrastructures critiques, d’assurer les chaînes d’approvisionnement et l’accès aux matières premières stratégiques. D’autres groupes de réflexion rédigent des rapports sur les réformes institutionnelles censées accompagner l’élargissement de l’Union. En clair, car c’est la conclusion implicite ou explicite de tous ces écrits, le champ des décisions nécessitant l’unanimité doit être restreint, voire totalement exclu de la politique étrangère. Au bout du compte, toutes les lectures libérales de la situation convergent vers une même conclusion : la logique de guerre appelle une centralisation du pouvoir. Le plan bruxellois, dans sa finalité, revient à démanteler la souveraineté nationale.

Mais pas seulement celle de la souveraineté : la liberté et la démocratie seraient également supprimées. En effet, dans l’intégration, ce sont toujours les États-nations qui ont été les véritables et ultimes garants de l’élément démocratique. Les Pères fondateurs eux-mêmes partaient du principe que le niveau supranational, nécessairement bureaucratique, ne pouvait être légitime que sous le contrôle des nations. Autrement dit, la bureaucratie ne doit jamais échapper au contrôle des dirigeants et représentants élus démocratiquement. Telle était l’essence du projet fondateur. Le programme de fédéralisation signifie donc inévitablement l’élimination du pouvoir du peuple du fonctionnement de l’Union européenne. Et d’ailleurs, les instruments de Bruxelles ne sont déjà plus véritablement démocratiques. Nous en faisons tous l’expérience, dans notre chair : ils s’immiscent dans les élections, mettent sous surveillance les partis souverainistes, ferment des événements conservateurs ou de droite, et financent à travers toute l’Europe des pseudo-ONG et des médias pro-fédéralistes et pro-guerre. Autrement dit, ce que certains appellent les États-Unis d’Europe, car c’est bien là leur objectif, consisterait en une structure politique antidémocratique et non responsable devant les peuples.

Mesdames et Messieurs, il y a une nouvelle : Bruxelles veut désormais ériger sur la logique de guerre une infrastructure financière massive. Il faut bel et bien des milliards d’euros pour financer la poursuite de la guerre en Ukraine. C’est pourquoi Bruxelles vise désormais la fédéralisation de l’argent des contribuables européens. Son objectif est d’instaurer un système dans lequel Bruxelles détiendrait elle-même le contrôle des ressources, sans que les États membres n’aient leur mot à dire. Aujourd’hui, la quasi-totalité des fonds versés à l’Union passent par les budgets nationaux. Bruxelles veut changer cela. Dans le même temps, ils restructurent l’architecture institutionnelle de l’Union, afin de pouvoir rediriger directement les fonds destinés aux États membres vers l’Ukraine.

Et troisièmement, ils réaffectent les budgets de la Politique agricole commune et des fonds de cohésion en fonction des priorités de guerre. Ceux qui ont vu les premières propositions budgétaires de l’Union pour les sept années à venir peuvent le constater noir sur blanc : ce dont je parle est déjà en cours d’élaboration écrite. Depuis le début de la guerre, la Commission européenne et le Parlement européen exigent en continu l’augmentation des ressources propres de l’Union, qui sont aujourd’hui très limitées. Or, « ressources propres » signifie ceci : les bureaucrates de Bruxelles prélèveraient et collecteraient directement les impôts eux-mêmes. Cela entraînerait bien sûr une réduction des bases fiscales nationales. Au total, ils prévoient de prélever ainsi, de manière indirecte, au moins 37 milliards d’euros par an aux États membres. Et cela n’est même plus dissimulé. La présidente de la Commission elle-même l’a récemment affirmé : le budget de l’Union européenne doit être utilisé à d’autres fins. Je cite : « parce qu’il faut répondre aux défis géopolitiques ».

L’un des instruments financiers évoqués est bien sûr l’emprunt commun. Nous y avons consenti une fois : lorsque l’Union a décidé de créer un fonds de relance pour réparer les conséquences de la pandémie. La promesse était claire : ces fonds serviraient à remettre les économies des États membres sur pied. Or aujourd’hui, à peine la moitié de ces ressources ont effectivement été versées aux pays concernés. La moitié ! Quatre ans après la pandémie !

Mesdames et Messieurs,

Si nous contractons de nouveaux emprunts, nous renforçons la fédéralisation. Si nous cédons à la pression de Bruxelles, nous atteindrons ce que j’appellerais le « moment Hamilton » de l’Europe. Car comme dans l’histoire des États-Unis, c’est l’endettement commun qui rend irréversible la fédéralisation. L’histoire nous l’a enseigné. Au sein du très influent institut Bruegel de Bruxelles, on pense désormais que puisque l’Europe doit se réarmer, « à court terme, il n’y a pas d’alternative à un financement par dette commune ».

Mesdames et Messieurs,

L’un des plus grands succès de la présidence hongroise de l’Union européenne a été l’adoption du Pacte pour la compétitivité. Aujourd’hui, pourtant, Bruxelles veut rediriger toutes les ressources disponibles vers l’industrie de l’armement ; ressources qui seraient ensuite réparties selon un système de quotas. C’est une économie de guerre fondée sur des quotas militaro-industriels, dont la production serait revendue à l’Ukraine, naturellement financée par l’argent des contribuables européens. Après les quotas verts, les quotas migratoires et les quotas de genre, voici venu maintenant le quota militaire. À Bruxelles, experts et anciens dirigeants parlent désormais ouvertement d’une économie de guerre. Lors d’un récent échange informel, un célèbre et influent conseiller de M. Van Rompuy, ancien président du Conseil européen, a déclaré ceci : « Passer l’Europe à l’économie de guerre n’est qu’une question de décision. »

Mesdames et Messieurs les Députés,

Le théâtre d’opérations du plan de guerre bruxellois, c’est l’Ukraine. Théâtre d’opérations d’abord au sens militaire : c’est là que la guerre se déroule. Mais aussi au sens politique : c’est là que Bruxelles s’efforce d’imposer de force une adhésion de l’Ukraine à l’Union européenne. Dans ses derniers documents stratégiques en matière de défense, la Commission européenne déclare explicitement que l’Ukraine est un espace d’intervention pour Bruxelles. Je cite : « Le soutien à l’Ukraine constitue aujourd’hui la tâche la plus urgente et directe de la défense européenne. L’Ukraine se trouve actuellement sur la ligne de front de la défense de l’Europe. » Cette doctrine s’accompagne déjà d’une campagne de propagande selon laquelle l’intégration de l’Ukraine dans l’Union pourrait se faire à moindre coût. Le très réputé Centre for European Policy Studies résume cela ainsi – je cite encore : « La main-d’œuvre ukrainienne, jeune et qualifiée, est une ressource précieuse. L’intégration de ses services et de ses capitaux ouvrira de nouvelles perspectives. Son secteur IT s’intégrera aux marchés européens, et ses capacités agricoles et minières renforceront la sécurité de l’approvisionnement de l’UE. » Le Bruegel Institute va plus loin encore, affirmant que l’élargissement des fonds de cohésion et des aides agricoles à l’Ukraine ne coûterait que 0,13 % du PIB de l’Union par an.

Nous avons fait nos propres calculs. Pour la Hongrie, les conséquences seraient dévastatrices. L’intégration complète de l’Ukraine coûterait environ 2 500 milliards d’euros répartis sur plusieurs années, soit douze fois le budget annuel de l’Union. La reconstruction de l’Ukraine représente un coût colossal : les estimations les plus prudentes évoquent 500 milliards de dollars ; les autorités ukrainiennes parlent même de 1 000 milliards d’euros. À cela s’ajoute le fonctionnement même de l’État ukrainien, qui coûte déjà aujourd’hui 100 milliards de dollars par an. Pour la Hongrie, cela représenterait une charge totale de 20 000 milliards de forints. Et la Hongrie deviendrait un contributeur net au budget européen, ce qui est excessif pour nous.

En résumé, la création d’un super-État centralisé, piloté depuis Bruxelles, ne sert pas les intérêts des Hongrois et des autres peuples vivant dans le bassin des Carpates. Nous avons connu de nombreux empires sur notre dos. Nous savons ce que cela signifie. Et même si tous ces empires se sont effondrés, et que nous sommes toujours là, nous ne souhaitons pas revivre cette expérience si possible. Ils se sont effondrés, et que nous sommes toujours là, mais les blessures qu’ils ont laissées au peuple hongrois ne sont toujours pas cicatrisées. La dépopulation sous l’occupation ottomane, les guerres mondiales, le démembrement du pays à Trianon : tout cela fut l’œuvre, voire la faute, des empires successifs qui dominaient à ces époques. Si nous pouvons y échapper, ne laissons pas l’empire revenir, fût-ce sous un costume bruxellois. Notre mission, à mes yeux, est donc claire : empêcher que cet empire bruxellois en construction vienne, lui aussi, s’asseoir sur notre cou.

Mais comment y parvenir ? Voilà toute la question. Je crois qu’il nous faut un véritable coup de maître, une ruse à la hussarde. En un mot : pendant que l’empereur fait la guerre, nous devons prendre Bruxelles, à la manière de Hadik à Berlin. Tandis que Bruxelles prépare la guerre, nous devons renforcer toutes les initiatives européennes qui défendent la paix. Car cette guerre ne coûte pas cher qu’aux Hongrois, c’est un fardeau pour chaque Européen. Et c’est là notre chance. Nos enquêtes montrent que dans 11 pays européens, la majorité de l’opinion publique s’oppose à une adhésion accélérée de l’Ukraine à l’Union, indépendamment de la situation sur le front. Seuls dix pays la soutiennent clairement. De la même manière, la moitié des citoyens européens rejettent l’envoi d’armes à l’Ukraine. Et 67 % des Européens refusent l’envoi de troupes. Il existe donc une marge de manœuvre politique considérable.

Avec de bonnes manœuvres, les plans de Bruxelles peuvent être déraillés. Ces dernières années, nous avons patiemment mis en place les fondations organisationnelles d’un tel plan. Nous avons fondé la grande famille des patriotes, qui constitue aujourd’hui le troisième plus grand groupe au Parlement européen. Les Conservateurs européens, le groupe « Europe des nations souveraines » et notre parti forment ensemble une alliance anti-fédéraliste. Si nous unissons nos forces, nous pourrions créer la plus grande coalition du Parlement européen. Un jour. Parfois, la patience est la plus précieuse des vertus. Et ce « jour », c’est maintenant. Il faudra avancer pas à pas pour pirater, pièce par pièce, les projets de Bruxelles.

Permettez-moi enfin d’évoquer la coopération en Europe centrale. Avec le départ du Royaume-Uni, l’équilibre des forces dans l’Union européenne a basculé. L’axe franco-allemand, lorsqu’il fonctionne, peut aujourd’hui imposer pratiquement tout ce qu’il veut au sein de l’UE. Les pays d’Europe centrale au tempérament souverainiste, les membres du groupe de Visegrád, ont perdu leur unique allié puissant, l’Angleterre. Les gouvernements libéraux en ont profité pour abandonner le V4 : c’est ce que la Pologne et la Tchéquie ont fait. C’était leur réponse à cette nouvelle donne, mais je pense que c’était une erreur. Il ne fallait pas rallier l’axe franco-allemand : il fallait renforcer le V4. Il le fallait hier, et il le faut encore aujourd’hui. Une coopération centre-européenne renouvelée pourrait être la clé pour empêcher le peuple hongrois de se retrouver, une fois de plus, sous un protectorat impérial. Et dans cette optique, le résultat de l’élection présidentielle en Pologne est un signal rassurant.

Mesdames et Messieurs,

Les représentants des Hongrois d’outre-frontière ont eux aussi un rôle important à jouer. Construire de bonnes relations avec les pays voisins, c’est bénéfique pour les Hongrois qui y vivent, et c’est bénéfique pour la coopération centre-européenne. Il serait essentiel qu’au cours des dix prochaines années, nous apprenions à un million de personnes à parler le hongrois dans le bassin des Carpates. Cela exige des formations, mais aussi une capacité à faire aimer les richesses du monde hongrois. Une telle initiative faciliterait le dialogue, au sens figuré comme au sens propre. Je note au passage que les Hongrois de la mère-patrie ne perdraient rien non plus à apprendre une ou deux langues de leurs voisins. Le bon voisinage représente la meilleure chance de réussite pour les communautés hongroises au-delà des frontières. Mais nous ne devons pas commettre l’erreur des anciens gouvernements libéraux : sacrifier l’intérêt national au nom de bonnes relations. Le bon voisinage ne peut reposer que sur la force et le respect. Il exige un langage clair et une politique nationale compréhensible de tous.

Dans la pensée du gouvernement hongrois, une politique nationale claire et compréhensible repose sur quatre principes. Vous les connaissez, mais permettez-moi de les rappeler brièvement. Premier principe : pour nous, les Hongrois d’outre-frontière passent avant tout. Il ne peut y avoir de bon voisinage lorsque les droits des Hongrois sont bafoués. Deuxième principe : nous recherchons de bonnes relations avec les dirigeants des pays voisins, partant du principe que nos intérêts géopolitiques européens convergent, et qu’il serait une erreur de ne pas coopérer. Cette approche a déjà porté ses fruits dans deux cas : la Serbie et la Slovaquie sont aujourd’hui de bons alliés, et la situation des Hongrois qui y vivent s’est améliorée. Troisième principe : ceux qui adoptent une attitude hostile envers les Hongrois ne peuvent pas compter sur leur soutien dans la politique européenne. Quatrième principe : l’Europe centrale ne peut être forte qu’avec la Hongrie. La pérennité de la Hongrie est dans l’intérêt de toutes les autres nations de la région.

Mesdames et Messieurs,

Si nous accomplissons notre mission comme il se doit, c’est ici, en Europe centrale, que nous arrêterons la politique bruxelloise fédéraliste et pro-guerre. L’Europe centrale n’est pas l’arrière-cour de Bruxelles, mais l’avenue principale du continent. Notre tâche est de l’ouvrir à la circulation.

Je vous souhaite bon courage dans cette mission !

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